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Présidentielles France-2007


Les collègues de Sarkozy complotent pour le faire tomber

Par John Lichfield à Paris
The Independent, publié le 9 septembre 2006

article original : "Sarkozy's colleagues plot his downfall ."

Une guerre civile à peine déguisée s'est déclenchée en France au sein du parti de la majorité, alors que les forces loyales au Président Jacques Chirac font une tentative pour faire tomber Sarkozy, le favori du centre-droit pour l'élection présidentielle de l'année prochaine.

Deux personnalités de haut rang - le Premier ministre, Dominique de Villepin, et la Ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie - ont suggéré qu'ils puissent se présenter contre M. Sarkozy l'année prochaine même si ce dernier devient, en janvier, le candidat officiellement choisi par le parti.

Ces derniers jours, il y a eu une campagne de rumeurs au sein de l'UMP sous-entendant que M. Sarkozy, le Ministre de l'Intérieur, était devenu incontrôlable et même dangereux.

Un ministre a dit en privé que, s'il y avait un deuxième tour au printemps prochain entre M. Sarkozy et Ségolène Royal, la favorite socialiste, il "voterait Royal sans hésiter". Un autre ministre, s'exprimant aussi en privé, a dit : "Tout devrait être fait pour aider Sarkozy à se prendre les pieds dans le tapis, en tant qu'acte de salubrité publique".

M. Sarkozy, 51 ans, le favori des sondages d'opinion dans la course à la présidence du printemps prochain, a annulé hier tous ses engagements publics. Ses officiels ont déclaré qu'il souffrait d'une "sévère migraine". L'une des réunions qu'il a sautées était le petit-déjeuner avec les dirigeants du parti au pouvoir, accueilli par M. de Villepin à Matignon, la résidence officielle du Premier ministre. Lors du précédent "petit-déjeuner du gouvernement", l'ambiance était si glaciale qu'il s'est terminé en moins d'une demi-heure.

Le brusque tourbillon d'attaques privées et publiques contre M. Sarkozy, à l'intérieur de son propre camp, porte tous les signes d'avoir été coordonné et mené de tout en haut. La répugnance du Président Chirac à l'endroit de Sarkozy, un ancien protégé, est bien connue, même si les relations entre les deux hommes semblaient s'être restaurées pendant l'été.

Cependant, ces dernières semaines, M. Sarkozy a rendu furieux le Président en critiquant la politique étrangère pendant une visite aux Etats-Unis et en appelant une fois de plus à la "rupture" avec la dérive et le "déclin" de ces deux dernières décennies.

En d'autres termes, M. Sarkozy a bien fait comprendre qu'il avait l'intention de se présenter contre la politique centriste du gouvernement et la vacuité intérieure des 11 années de la présidence Chirac.

Une forme ou une autre de représailles par les forces de la Chiraquie était prédite depuis longtemps. Une guerre civile brutale et destructrice pour le contrôle du centre-droit - loin de la première dans l'histoire de France récente - semble être en cours.

M. Chirac, qui aura 74 ans le mois prochain, n'a pas encore officiellement abandonné l'espoir de se présenter pour un troisième mandat. En réalité, la popularité de M. Sarkozy et toute une série de désastres gouvernementaux ont écarté toute possibilité que M. Chirac ou M. de Villepin s'emparent de la "nomination" pour l'UMP en janvier prochain. M. Sarkozy, le président du parti, a promis une politique économique plus libérale, une ligne plus dure sur l'immigration et une "rupture" avec le "modèle social" de taxes élevées, d'investissement public généreux (pour certains) et de dépenses sociales. Le Président Chirac s'en est pris aux "pessimistes professionnels" qui critiquent un modèle social qui fait "partie de notre identité".

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]