Présidentielle 2007
Les dirigeants d'entreprises français craignent que celui ou celle qui remportera la toute prochaine élection présidentielle pourrait se retrouver mal placé pour résoudre les problèmes économiques qui sont profondément ancrés dans le pays.
Avec le scrutin qui aura lieu dans moins de quinze jours, les patrons s'inquiètent de ce qu'aucun des principaux prétendants - Ségolène Royal à gauche, François Bayrou au centre et Nicolas Sarkozy à droite - n'aient fait campagne sur des projets suffisamment hardis pour accroître la croissance, enrayer le chômage et réduire la dette publique massive.
Laurence Parisot, chef d'entreprise et présidente de l'organisation patronale MEDEF, les a enjoints à être "moins timorés" et "plus ambitieux" dans leurs politiques et à viser une croissance économique entre 3 et 4% plutôt que de se contenter d'accepter les taux plus faibles que le pays a connus ces dernières années.
Elle a déclaré : "Nous savons qu'à 3% - ou mieux à 4% - tous les problèmes du pays seraient progressivement mais sûrement et largement résolus… le chômage, le pouvoir d'achat, la nouvelle pauvreté, les déficits publics, la dette, l'insécurité et la criminalité serait résolus".
Cependant, a-t-elle dit, au lieu de se présenter avec une "vision cohérente" de la politique économique, les candidats se sont concentrés sur des détails accrocheurs.
Le MEDEF veut que le futur président se concentre plus sur le côté offre de l'économie, stimulant l'investissement et la recherche.
Au même moment, l'ancien ministre de l'industrie Alain Madelin, fervent supporter d'une politique économique plus libérale et député dans le propre parti de Sarkozy, l'UMP, a accusé les politiques de tous les candidats de manquer de "cohérence politique".
Dans une interview dans Le Monde, il a déclaré que pour atteindre la croissance requise, le pays a besoin d'une réforme fondamentale du système d'imposition, d'ouvrir plus les entreprises publiques et protégées à la concurrence et de libérer le marché du travail.
Toutefois, le problème pour Royal, Sarkozy et le candidat surprise Bayrou, est que, tandis que de nombreux Français acceptent la nécessité de réformer l'économie - la croissance est faible, le chômage baisse légèrement mais il est encore à 8,4% et la dette publique se maintien à 64% du PIB -, ils sont moins prêts à accepter les conséquences de ces réformes.
Et bien que la France puisse avoir ses problèmes, la pauvreté relative est encore faible comparée avec des pays comme le Royaume-Uni et de nombreux Français qui ont la sécurité de l'emploi - en particulier les fonctionnaires qui représentent environ un cinquième de la population active - ont beaucoup à perdre.
Ségolène Royal, dont la campagne n'a pas encore excité l'imagination du public, a proposé quelques mesures populaires consistant à augmenter le SMIC et le minimum vieillesse, à aider l'investissement pour les petites entreprises et à augmenter les dépenses pour les universités françaises qui sont négligées.
Mais elle a fait face à une forte critique sur comment elle financerait de telles mesures.
François Bayrou, du parti centriste, l'UDF, a promis une "Loi pour les Petites Entreprises" leur permettant d'embaucher deux nouveaux salariés sans payer les charges sociales pesantes pendant une période déterminée et de payer aux salariés une majoration pour les heures travaillées au-delà des 35 heures statutaires.
Un de ses problèmes est que les électeurs craignent que, aussi intelligentes soient ses politiques, Bayrou, qui dirige un petit parti, pourrait découvrir qu'il est très difficile de mettre en application des réformes face à l'opposition du parti Socialiste et de l'UMP de Sarkozy.
Sarkozy lui-même, ministre de l'intérieur jusqu'à il y a peu, a été décrit depuis longtemps comme l'homme qui pourrait apporter une dose de libéralisme économique à l'anglo-saxonne dans le pays.
Mais Sarkozy est déjà une personnalité controversée et s'il essayait de mettre en place des réformes économiques radicales il affronterait presque certainement une forte opposition, non seulement à l'Assemblée Nationale mais aussi sous la forme de manifestations massives.
Ceci explique pourquoi le patron de l'UMP a, par moment, adoucit son langage de "rupture" ou de pause avec le modèle économique social populaire mais coûteux de la France. Cependant, même ses propositions relativement modestes d'accroître la flexibilité du travail avec de nouveaux contrats de travail pourraient s'avérer très controversées.
L'année dernière, les plans du gouvernement actuel - dont Sarkozy faisait partie - de mettre en place un nouveau contrat temporaire et flexible destiné à maîtriser le chômage des jeunes a dû être remisé après des manifestations massives sur tout le territoire.
Quelques commentateurs craignent que la situation économique en France devra commencer par s'aggraver - en particulier par rapport au voisin allemand - avant qu'il y ait une volonté publique d'accepter des réformes significatives.
Traduit de l'anglais par [JFG/QuestionsCritiques]