Présidentielles France-2007
L'excitation qui a entouré les ambitions présidentielles de Ségolène Royal a débordé hier en "Ségomania", alors que 4.000 personnes se sont entassées dans un village de Bourgogne pour la voir, en fait, lancer sa campagne pour devenir la première femme de l'ère contemporaine à diriger la France.
Trois personnes ont été légèrement blessées au moment où la foule a surgi et s'est bagarrée avec les équipes de télévision, alors que la politicienne socialiste de plus en plus populaire arrivait à Frangy-en-Bresse, en Bourgogne, pour un festival politique le temps d'un week-end.
Mme Royal, à 53 ans, a pris clairement la tête dans les sondages d'opinion, devançant tous autres candidats, dans cette course présidentielle qui se tiendra en avril et en mai de l'année prochaine. Elle s'est servi du festival annuel de Frangy - "La Fête de la Rose" - pour faire sa déclaration la plus complète jusqu'à présent sur ses ambitions et son éventuel programme. Dans un discours de 45 minutes, l'ancienne ministre de l'éducation et de la santé a promis que - "si en situation de le faire" - elle construira une nouvelle forme de politique socialiste, fondée sur la responsabilité individuelle et les protections de l'Etat.
Elle a aussi attaqué la politique du Président Jacques Chirac au Proche-Orient, déclarant que la France, "pour gagner le respect du monde", devrait être prête à agir, pas de se contenter de parler.
"Je lance un appel, ici à Frangy, pour le rassemblement de toutes celles et de tous ceux qui veulent le changement et qui veulent que la France se redresse", a-t-elle déclaré.
Mme Royal, présidente de la région Poitou-Charente, de l'Ouest de la France, est accusée par ses rivaux socialistes et ses opposants de centre-droit d'être un poids-plume en politique, avec une expérience insuffisante en affaires étrangères et en économie pour être Présidente de la République.
Néanmoins, les scènes d'hier à Frangy (pop. 600) suggèrent qu'elle soit devenue la première politique d'un parti de gouvernement, en France, à générer la ferveur populaire, depuis la campagne présidentielle victorieuse de son mentor, François Mitterrand, il y a 25 ans. Arnaud Montebourg, le député socialiste radical qui s'occupait cette année du festival, a annoncé sous les clameurs de la foule : "Frangy vient de connaître sa première émeute". Plus de 4.000 personnes seraient venues pour le dernier jour du festival - plus de quatre fois le nombre habituel.
En à peine un an, depuis qu'elle a indiqué prudemment, en septembre dernier, qu'elle pourrait être candidate à la présidence, Mme Royal est devenue, en France, la plus populaire de tous les politiciens. Pendant une grande partie de cette période, elle a lutté au coude à coude pour ce titre avec le candidat probable de la droite au printemps prochain, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy.
Malgré tout, un sondage d'opinion, conduit par l'IFOP pour le quotidien Ouest-France, a placé hier, pour la première fois, Mme Royal en tête devant M. Sarkozy. Ce sondage semble indiquer que Mme Royal battrait M. Sarkozy au deuxième tour de l'élection présidentielle de mai prochain par 55% contre 42%.
Les autres prétendants, parmi les dirigeants socialistes, considéraient que la popularité de Ségolène Royal n'était qu'un feu de paille. Ils pensaient que son manque d'expérience des plus hautes fonctions politiques et le fait d'être une femme la feraient retomber.
C'est l'opposé qui s'est produit. La France a soif d'une manière différente de faire de la politique tout en restant méfiante vis-à-vis du changement. Le fait que Mme Royal soit une femme et qu'elle parle dans un langage dépouillé des clichés politiques habituels lui a permis d'émerger comme un "nouveau visage", sans apparaître comme une menace de rupture brutale avec le passé. Officiellement, elle n'est pas encore candidate. Les militants du parti socialistes choisiront leur candidat, lors d'un vote, en novembre. Toutefois, dans son discours de Frangy, hier, Mme Royal n'a jamais été aussi près jusque là de déclarer officiellement ses ambitions. Elle a appelé - dans un style plutôt Blairesque ou Clintonien - la Gauche à se "ré-approprier" la responsabilité individuelle comme valeur de gauche.
Mais elle a aussi suggéré qu'une nouvelle considération pour le travail doive commencer par le rejet de la "précarité" de l'emploi, que les nouvelles technologies et la mondialisation ont apportée.
Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]