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RD Congo

Discours de Jean-Claude Vuemba Luzamba

Député National, élu de Kasangulu
Président National du MPCR

"J'EN APPELLE À LA RESPONSABILITÉ DE TOUS"

conférence de presse à sa résidence privée de Kinshasa
lundi 4 décembre 2006

Congolaises, Congolais, mes chers compatriotes,

La Cour Suprême de Justice a rendu son verdict : c'est Joseph Kabila Kabange qui a été élu président de la République Démocratique du Congo. Comme vous le savez, j'ai soutenu la candidature de Jean-Pierre Bemba Gombo et jusqu'au dernier moment j'espérais qu'il deviendrait notre nouveau président. Apparemment les urnes en ont décidé autrement et aujourd'hui, avec Jean-Pierre Bemba, je dois me ranger derrière la décision des institutions républicaines. C'est ainsi que fonctionne la démocratie et, par conséquent, nous nous retrouvons dans l'opposition.

Une nation, la nation congolaise, est à bâtir. Notre pays, qui sort de dix années de guerre civile, qui a vu mourir quatre millions de nos frères et sœurs, est entièrement à construire. La tâche est immense et je souhaite au Président Kabila de parvenir à rassembler les forces vives pour commencer cette entreprise le plus vite possible.

En tant qu'élu de l'Assemblée Nationale de la RDCongo, député de Kasangulu, sous l'étiquette du MPCR, le Mouvement du Peuple Congolais pour la République, je représente l'opposition radicale aux dérives du passé : La corruption généralisée érigée en tant que système anti-économique, le pillage de nos richesses, orchestré par des entreprises étrangères peu scrupuleuses avec la complicité de certains de nos compatriotes, les atteintes à la liberté d'expression et notamment celle de la presse et les atteintes à la démocratie en général. Nous avons connu le bradage de la souveraineté nationale et la perte de l'intégrité territoriale. Cela doit cesser.

Voyez-vous, mes chers compatriotes, une page de notre histoire est peut-être en train de se tourner. Pour la première fois de notre histoire nous avons la possibilité de choisir nous-même notre destin. Cela s'appelle la démocratie. Mais il faut savoir qu'il ne suffit pas de décréter la démocratie pour régler tous nos problèmes. Il faudra une vigilance de tous les instants, comme je l'ai dit, pour assurer la liberté totale de la presse, des radios et des télévisions et pour faire vivre notre démocratie. L'opposition dont je fais aujourd'hui partie doit pouvoir s'exprimer en toute liberté et nous avons besoin d'institutions neutres garantes de ce nouvel esprit républicain. Les députés de l'Assemblée Nationale doivent pouvoir travailler en toute sérénité et en toute indépendance.

En ma qualité de député à l'Assemblée Nationale de la RD Congo et de président du Mouvement du Peuple Congolais pour la République (MPCR), je serai attentif à la manière dont le nouveau gouvernement remplira ses promesses. Mon engagement aux valeurs de la démocratie est absolu et c'est sans faille que je protégerai les intérêts des plus faibles, tant dans le territoire que je représente, Kasangulu, que dans l'ensemble de notre pays.

Aujourd'hui je m'adresse à vous tous, mes chers compatriotes, Congolaises et Congolais de toutes les 11 provinces, pour vous dire que vous pouvez compter sur moi pour vous défendre à la Chambre des Députés. De mon côté, je compte sur vous pour aider notre pays à surmonter les difficultés immenses de la reconstruction et du développement.

Nous avons besoin de construire des dispensaires, des hôpitaux, des écoles, des routes et des lignes de chemin de fer. Nombre de nos frères et sœurs sont atteints de maladies graves, notamment de la malaria ou du SIDA, et les traitements ne sont pas disponibles. Cela doit changer. L'avenir du pays passe par l'éducation de la jeunesse. Pourtant, beaucoup de nos enfants ne sont pas ou peu scolarisés. Cela doit changer. Les immenses richesses de notre pays ont été bradées depuis trop longtemps par les dictatures successives. Ces richesses appartiennent au peuple congolais et c'est aux Congolaises et aux Congolais qu'elles doivent d'abord bénéficier. Plus de 1.000 Congolais meurent chaque jour de malnutrition et de maladies. Cela doit cesser. Le peuple doit pouvoir manger à sa faim. Il a besoin de l'eau courante et des réseaux d'assainissement. Il faut amener l'électricité dans les foyers. Presque tout reste à faire dans ce domaine.

Congolaises, Congolais, mes chers compatriotes, je sais que vous êtes prêts à défendre votre pays et à travailler dur pour permettre à vos enfants d'avoir une vie meilleure. C'est tous ensemble que nous réussirons à bâtir la nation prospère à laquelle nous aspirons. L'unité du peuple congolais est la priorité absolue dans la nouvelle voie que nous avons collectivement choisie. Je le répète, ce ne sera pas facile et il faut, dès maintenant, être vigilant sur la nouvelle politique que nous propose le nouveau pouvoir.

Mais, que nous propose le président ?

Réaliser les infrastructures nécessaires pour que les gens puissent circuler entre les régions : routes, rails et ponts ? C'est pourquoi je demande dès à présent une politique de grands travaux, soutenus par la communauté internationale.

Créer des emplois ? Pour cela il faut une politique industrielle et agricole ambitieuse.

L'éducation ? Ecoles primaires, secondaires, instituts techniques, universités, tout est à reconstruire. Comme je l'ai déjà dit, l'éducation est la base du développement. Nous serons vigilants sur ce chantier fondamental.

L'eau et l'électricité ? Déjà, dans ma province du Bas-Congo, nous avons démarré de nombreux chantiers d'électrification. Les poteaux ont été livrés dans plusieurs villes et l'objectif est de produire et de livrer l'électricité nécessaire à la population et à l'industrie. Nous espérons que les autres provinces vont suivre l'exemple.

La santé ? Pour M. Kabila, c'est la priorité des priorités. Nous verrons comment il tiendra ses promesses.

Enfin, le président nous parle de la transparence dans la gestion de la cité et des affaires de l'Etat. Bref, de remettre de l'ordre dans le pays. Je comprends cette promesse comme la fin de la corruption généralisée, à commencer par celle des puissants. Sur ce dossier j'exercerai la plus grande des vigilances, car lorsque l'on vole le peuple, c'est le Congo tout entier qui souffre. Je veux que notre pays devienne un modèle pour l'Afrique et j'y veillerai.

Voyez-vous, mes chers compatriotes, je suis à vos côtés pour réaliser le rêve de toutes les Congolaises et de tous les Congolais. Pour commencer, il est nécessaire de renégocier tous les contrats miniers accordés pendant les dictatures successives. Ces contrats dépouillent le Congo de ses richesses. Je pense notamment à la privatisation éhontée de la Gécamines qui offre à certains charognards occidentaux le meilleur de nos ressources grâce aux contrats "léonins". Je pense aussi à certains de nos voisins : à commencer par l'Ouganda et le Rwanda qui sont devenus respectivement gros exportateurs d'or et de diamants. Savez-vous qu'en Ituri, pour 150 kilos d'or déclarés ce sont plus de 7 tonnes qui sont partis l'année dernière vers la Suisse en passant par Kampala ? Savez-vous qu'une grande partie des diamants des deux Kivu et du Kasaï Oriental se retrouvent à Kigali et que cela ne rapporte presque rien à notre pays qui produit ces richesses ? Cela doit changer. Je pense aussi au Colombo-Tantale, le Coltan, appelé minerai de la guerre et tant convoité. Je pense aussi aux 3.000 tonnes de Germanium du Katanga, métal rare utilisé dans les fibres optiques et les satellites, dérobés au nez et à la barbe des Congolais. C'est pourquoi, le rapport Lutundula qui a été "enterré" pendant la transition doit revenir à l'ordre du jour de l'Assemblée Nationale et ses conclusions servir de base au renouveau minier de la RD Congo.

Il ne faut pas oublier non plus les ravages causés sur la forêt primale et les abattages systématiques des animaux et des essences rares. Cela doit cesser. C'est la planète tout entière qui risque d'en souffrir et la communauté internationale doit nous aider financièrement à sauver cet écosystème.

Quand j'entends le nouveau pouvoir dire que nous devons compter d'abord sur nous-mêmes, mobiliser davantage nos ressources et nos recettes, je me demande de quelles recettes il parle. Le PIB [Produit Intérieur Brut] de la RDCongo s'est effondré au fil des ans avec la complicité de certaines multinationales, des dirigeants corrompus et des organismes comme la Banque Mondiale, qui nous a imposés le nouveau Code Minier de 2002. Ainsi, la porte au pillage légal du Congo est grande ouverte. Cela doit changer.

On nous dit que la bonne gouvernance doit passer en premier par la lutte contre la corruption. Nous, l'opposition radicale, fidèle aux idées d'Etienne Tshisekedi, disons exactement cela. Aujourd'hui, l'AMP et ses alliés défendent cette idée ? Et bien, dans le bénéfice du doute, acceptons de croire en leur sincérité. Je veillerai personnellement avec les membres de mon parti, le MPCR, et tous mes collègues de bonne volonté à l'Assemblée Nationale à ce que ces engagements soient respectés.

La période de transition qui a vu le jour avec les accords de Sun City en avril 2002 est maintenant révolue. La place doit revenir à présent aux institutions démocratiques, avec une nouvelle gouvernance et une opposition responsable. Cette nouvelle gouvernance, caractérisée par le nouveau pouvoir, a l'obligation de respecter ses promesses électorales. Et l'opposition responsable, quant à elle, demandera des comptes au gouvernement dans les plénières parlementaires et travaillera pour proposer une alternative crédible lors des prochaines élections en 2010 et 2011.

Congolaises, Congolais, mes chers compatriotes,

Il faut que vous sachiez que votre pays possède d'énormes richesses. Non seulement le Congo est très fertile, l'eau y coule à profusion, mais il est exceptionnellement riche en ressources minérales, en forêts, et le fleuve Congo est une source exceptionnelle d'énergie. Pourtant, en dépit de ces richesses, les Congolais n'ont connu que misères et privations durant les quatre dernières décennies. Au point qu'aujourd'hui la population congolaise fait partie des plus pauvres de toute l'Afrique.

Il appartiendra donc au nouveau gouvernement du pays ainsi qu'aux nouvelles autorités provinciales de changer le cours des choses et de permettre enfin à la population congolaise de recevoir les dividendes de la paix et de pouvoir connaître le développement auquel elle a droit. C'est l'appel que la population a lancé aux politiciens lors des élections.

Je forme les vœux les plus sincères pour que notre pays sorte du marasme dans lequel il a été plongé depuis trop longtemps. C'est tous ensemble que nous pourrons y parvenir. J'en appelle à la responsabilité de tous, gouvernement, opposition, fonctionnaires et simples citoyens pour retrousser nos manches et nous mettre tous ensemble au travail de la reconstruction de notre pays, tous ensemble au service de la nation.

Avec Dieu, nous sauverons le Congo !

Je vous remercie

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—> répondre à l'honorable JC Vuemba Luzamba