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Intervention d'Ernest-Antoine Seillière,
président de l'UNICE,

Conseil Européen de Printemps, le 23 mars 2006

texte original

MM. les Présidents, les Premiers ministres et les ministres,

C'est un grand honneur pour le président de l'UNICE d'avoir été invité à prendre la parole lors de l'ouverture du Sommet de Printemps et je remercie le Chancelier Schüssel pour son aimable initiative.

Comme vous le savez, l'UNICE représente 20 millions d'entreprises à travers ses 39 fédérations nationales et vous me permettez donc de m'exprimer dans la langue des affaires, qui est peut-être un peu trop directe, pour vous parler d'abord d'un réel paradoxe, le paradoxe européen d'aujourd'hui :

À un moment historique d'internationalisation économique intense des entreprises et des marchés, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Union, la gouvernance politique en Europe est entrée dans une crise profonde et une vision européenne renouvelée, à laquelle adhèrent les citoyens, semble bien lointaine.

Ce paradoxe inquiète profondément la communauté des affaires. Nous avons besoin de l'Europe. À l'ère de la mondialisation, nous avons besoin que l'Europe soit un acteur mondial crédible. Ceci est le message sans détour que vous délivre l'UNICE. Ne nous laissez pas tomber ! Je crois pouvoir vous dire que vous pouvez compter sur les entreprises pour qu'elles fassent tout leur possible pour contribuer à la croissance et à l'emploi. C'est leur rôle de saisir toutes les opportunités pour le faire, puisque leur développement, voire leur survie, dépend de leur dynamisme, de leur volonté et de leurs initiatives, et ce, quelle que soit leur taille. Mais j'espère que nous pouvons compter sur les dirigeants et les gouvernements européens et qu'ils prendront les mesures urgentes et à grande échelle nécessaires pour adapter notre environnement au nouveau monde dans lequel nous sommes et qu'ils le feront avec une gouvernance européenne efficace. Nous nous inquiétons de ce que non seulement aucune initiative ne soit prise pour surmonter l'immobilisme européen, mais qu'il y ait de nombreux signes d'un retour aux réactions nationales.

Nous vous appelons à résister à toutes les sortes de "protectionnisme" qui décourage le regroupement inter-frontalier des sociétés. Ce danger est réel mais je suppose que cela n'empêchera pas les rachats, les acquisitions et les alliances, que les entreprises lanceront en Europe à cause de leurs besoins stratégiques de concurrence et de mondialisation. Nous appelons la Commission Européenne à contrôler et à s'assurer que les Traités de l'UE sont respectés. La Commission doit aussi prendre des mesures énergiques contre ces états-membres qui enfreignent les Directives du Marché Interne existantes.

La communauté des affaires demande à l'Europe de se ressaisir et de créer le nouvel élan dont nous avons besoin pour faire face demain à la Chine et à l'Inde, alors que nous sommes déjà confrontés aux Etats-Unis et au Japon.

Nous demandons aussi deux impulsions fortes :

o La mise en place de réformes nationales

Nous savons que la raison essentielle de notre croissance molle, loin de l'objectif de 3% fixé par la stratégie de Lisbonne, est l'adaptation désespérément lente de la plupart de nos sociétés à :

- encourager la recherche et l'innovation
- soutenir la création et la croissance des PME
- rendre les marchés du travail plus flexibles
- se battre pour moins de règlements et de meilleures règles

En un mot : mettre en place les Programmes Nationaux de Réformes, que le Président Barroso recommande vivement. Ceci est l'essence du message que nous vous délivrons et qui a été unanimement signé par tous mes collègues, les présidents des fédérations membres de l'UNICE.

o Etendre le marché intérieur

Ceci est particulièrement vital dans les domaines des services et de l'énergie.

Sur la directive services, nous pensons qu'il est positif qu'une directive soit en cours. Mais, vu de l'angle de la communauté des affaires, le compromis du parlement ne favorise pas assez la croissance et la création d'emplois. Nous attendons de la Commission qu'elle apporte des idées et qu'elle prenne des mesures pour apporter une efficacité complète à cette extension du marché intérieur, dont le besoin est urgent après la libre circulation des marchandises, des capitaux et des personnes. Nous serions heureux de soutenir un texte qui aiderait les services à s'étendre et à s'accroître dans toute l'Europe.

Sur l'énergie, nous accueillons favorablement le fait que le Conseil de l'Europe fasse de l'énergie l'un des principaux sujets lors de son Sommet de Printemps. Il est grand temps qu'une politique européenne cohérente de l'énergie voie le jour. Cette stratégie devrait comprendre trois objectifs :

Premièrement, établir la concurrence sur des marchés énergétiques ouverts et interconnectés.

Deuxièmement, intégrer la dimension environnementale dans une stratégie énergétique cohérente. En particulier, en prenant en compte le lien entre l'énergie et les émissions de CO2, l'énergie nucléaire doit être maintenue comme option.

Troisièmement, développer une coopération plus étroite entre les états-membres pour assurer la sécurité de la fourniture d'énergie et développer une politique externe plus active dans le secteur de l'énergie.

Je voudrais terminer avec un mot sur le Modèle Social Européen. Nous respectons les systèmes sociaux nationaux européens, mais nous savons que notre compétitivité est directement liée à notre capacité en tant que gouvernements à provoquer leur nécessaire adaptation à la concurrence mondiale. C'est une tâche difficile mais nécessaire. Nous soutenons un Modèle Social Européen qui allie le progrès économique et la solidarité nationale, et nous croyons que le dialogue social est essentiel. Au niveau européen, nous nous sommes accordés sur un nouveau programme de travail pour la période 2006 - 2008 et nous contribuerons à ce dialogue.

MM. les Présidents et les Ministres, je prends cette invitation à m'adresser à vous comme le symbole du partenariat entre les syndicats, les employeurs et les gouvernements afin de poursuivre activement les objectifs de l'agenda de Lisbonne et conduire l'Europe au succès.

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]