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Inflation et Spéculation
Par Seth Sandronsky
"Inflation and Speculation", CounterPunch, le 28 mars 2006
Exprimant ce que l'Associated Press avait intitulé "un point de vue désormais largement consensuel", M. Bernanke, le nouveau président du conseil d'administration de la Réserve Fédérale, a déclaré qu'un faible taux d'inflation était la clé de la croissance de l'économie et du marché du travail aux Etats-Unis.
D'accord, mais comment cette politique s'applique-t-elle au marché national inflationniste de l'immobilier d'habitation ?
Il est largement admis que la politique de la Fed, consistant en de faibles taux d'intérêt, a maintenu le crédit bon marché. Par contraste, la Banque Centrale Européenne a poursuivi une politique monétaire plus restrictive.
Au contraire de celle de la BCE, la politique de la Fed, sous la surveillance de M. Alan Greenspan, a attisé les envolées record de l'immobilier et du refinancement des prêts. Durant les 30 derniers mois, la contrepartie de cette mesure de fond a été la suivante : aux Etats-Unis le taux d'inflation a devancé le taux de croissance de la rémunération horaire.
L'inondation de produits bon marché en provenance de l'étranger, essentiellement de la Chine, a permis de rendre moins visible cette stagnation des salaires. La banque centrale chinoise a aussi prêté aux Etats-Unis l'argent pour acheter ces importations. L'offre et la demande peuvent fonctionner d'étranges façons... vraiment !
En même temps, la forte hausse des prix des logements a conduit de nombreux salariés américains à supporter une dette supplémentaire, puisque le marché des prêts immobiliers s'est accru de 8.000 milliards de dollars (6.500 Mds d'euros). Comparez cette dette avec les 7.000 milliards de dollars de richesse virtuelle (selon les estimations) qui se sont volatilisés lors du crash boursier du début du siècle ! Bien sûr, si ces montants sont du même ordre de grandeur, ils contiennent une différence de taille.
En effet, les gens vivent dans des maisons ; personne n'habite dans des valeurs boursières. Pourtant l'inflation affecte ces deux types d'actifs, dont le prix fluctue vers le haut ou vers le bas, et, fait décisif, pour booster le pouvoir d'achat des entreprises et des consommateurs, ceux-ci peuvent être utilisés pour financer des emprunts.
Lors de son audition initiale devant le Congrès, M. Bernanke a parlé d'un déclin des prix des habitations aux Etats-Unis qui sera dans le futur plutôt lent que rapide. Son espoir est qu'un "atterrissage en douceur" de son programme d'inflation faible aidera à stabiliser l'augmentation générale des prix des biens et des services. À présumer que cela protège les entreprises, les foyers et les investisseurs de dommages collatéraux inflationnistes sur leurs salaires et leurs investissements, tout en entraînant la croissance !
L'inflation sur le prix des logements a été l'exception - une caractéristique de la Fed avant l'arrivée de M. Bernanke. En fait, monétiser sur le marché la valeur des actifs qui abritent des êtres humains a compensé, aux Etats-Unis, la stagnation des salaires et des revenus des ménages. Puisque M. Bernanke s'engage publiquement sur une politique de faible inflation, on se demande ce qui remplacera la montée des prix des logements pour stimuler l'économie américaine - la plus grande du monde.
On peut douter que la réduction du déficit budgétaire du gouvernement fédéral soit la bonne réponse. Une telle politique fiscale heurterait la population active de la nation en retirant de l'argent de la circulation. Il y aurait moins de revenus à dépenser pour la nourriture, le logement et le transport - toutes choses étant égales par ailleurs.
Les gens réels - les créanciers et les débiteurs, les fabricants et les revendeurs - supporteront en fait le dégonflement de la bulle immobilière. Etant donnée la taille de l'économie américaine, les répercussions de cette déflation à terme du marché immobilier serviront de test au leadership de M. Bernanke.
Seth Sandronsky est membre du Sacramento Area Peace Action et co-rédacteur en chef de Because People Matter, le quotidien progressiste de Sacramento.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par [JFG- QuestionsCritiques]