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crimes de guerre

Israël et le Hamas doivent rendre des comptes

par Thalif Deen
Asia Times Online, le 17 septembre 2009

article original : "Israel, Hamas called to account"

NEW YORK – Une commission d’enquête des Nations-Unies, constituée de quatre membre et qui vient juste de terminer ses investigations sur le conflit brutal de l’année dernière à Gaza, apporte des arguments convaincants qui accusent Israël de crimes de guerre pour ses attaques militaires incessantes durant 22 jours contre les Palestiniens, essentiellement des civils, dont des femmes et des enfants.

Ces accusations proviennent surtout des diverses violations des droits humains internationaux et de la loi humanitaire.

L’équipe onusienne, conduite par le Juge Richard Goldstone, déclare qu’il y a également des preuves que des groupes armés palestiniens, en particulier le Hamas, ont commis des crimes de guerre avec leurs attaques répétées au mortier contre des civils dans le sud d’Israël.

Mais leur accusation la plus sévère est dirigée contre l’Etat d’Israël, qui est accusé d’avoir imposé un blocus contre Gaza « équivalant à une punition collective », menée comme élément d’une « politique systématique d’isolement progressif et de privation contre la Bande de Gaza. »

Le nombre de Palestiniens tués au cours de ce conflit est estimé entre 1.387 et 1.417, à comparer avec les quatre victimes israéliennes dans le sud d’Israël et les neuf soldats tués au cours des combats, dont quatre sous le feu israélien.

Durant cette opération militaire impitoyable, codifiée sous le nom « Opération Plomb Fondu », les Israéliens ont détruit des maisons, des usines, des puits, des écoles, des hôpitaux, des postes de police et autres bâtiments publics.

« Des familles vivent toujours au milieu des gravats de leurs anciennes maisons après la fin des attaques, alors que la reconstruction a été impossible à cause du blocus [de Gaza par Israël] qui se poursuit », déclare le rapport de 574 pages publié mardi.

Cette étude montre que les actes israéliens qui privent les Palestiniens de leurs moyens de subsistance, emploi, logement, eau – et qui leur refuse également la liberté de mouvement et leur droit de quitter et d’entrer dans leur propre pays – pourrait conduire une cour de justice compétente à établir que les crimes de persécution et contre l’humanité ont été commis.

Lors d’une conférence de presse, mardi, Goldstone a déclaré à des journalistes que le gouvernement israélien n’avait pas mené d’einvestigations crédibles sur ces violations déclarées.

Il a dit que l’équipe de l’ONU avait recommandé que le Conseil de Sécurité de 15 membres exige qu’Israël se présente devant lui dans les six mois, pour répondre des enquêtes et des poursuites que l’Etat Hébreu devrait entreprendre au regard des violations citées dans ce rapport.

L’équipe [de Goldstone] a également recommandé au Conseil de Sécurité d’établir son propre groupe d’experts indépendants afin que celui-ci lui rende compte des progrès des enquêtes et des poursuites israéliennes.

« Si les rapports des experts n’indiquent pas dans les six mois que des procédures de bonne foi et indépendantes ont lieu, le Conseil de Sécurité devrait renvoyer la situation à Gaza devant le procureur de la Cour Criminelle Internationale [CCI]. »

L’équipe a également recommandé que le même groupe d’experts rapporte au Conseil de Sécurité les procédures entreprises par les autorités compétentes à Gaza au regard des crimes commis par le camp palestinien.

En l’absence de bonne foi et de procédure indépendante, le conseil devrait renvoyer cela également devant le procureur de la CCI.

Interrogé pour savoir si un Conseil de Sécurité hautement partisan accepterait ces propositions, Goldstone a répondu : « Je serais déçu si l’un des membres permanents [les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, la Chine et la Russie] s’opposait à une telle résolution. »

Nadia Hijab, membre émérite de l’Institut aux Etudes Palestiniennes, dont le siège se trouve à Washington, a déclaré à Inter Press Service que les conclusions du rapport Goldstone « feront froid dans le dos à beaucoup [de personnes] ».

« Ce [rapport] va être difficile à ignorer à cause de la gravité des accusations, de l’étendue de sa couverture et de son impartialité », a-t-elle ajouté.

Hijab a dit que l’équipe onusienne semble également avoir trouvé un moyen de donner du poids à ses recommandations, avec son appel au Conseil de Sécurité de renvoyer cette affaire devant la CCI – si Israël, ainsi que le Hamas, n’entreprennent pas des investigations et des poursuites sérieuses, contrôlée de façon indépendante, contre les responsables de crimes de guerre.

Tandis que ce rapport est impartial dans l’attribution des responsabilités, a-t-elle indiqué, il a été clairement attribué à Israël une responsabilité bien plus grande.

« Il reconnaît son rôle en tant qu’Etat membre des Nations-Unies et signataire des conventions internationales, ainsi que l’énormité des dommages qu’il [Israël] a infligé », a déclaré Hijab.

Par exemple, a-t-elle dit, l’équipe Goldstone a recommandé que l’Assemblée Générale de 192 membres établisse un fonds de séquestre afin qu’Israël puisse indemniser les Palestiniens de Gaza.

« Le mot en ‘R’ des réparations est une mauvaise nouvelle pour Israël et pourrait établir un précédent pour des plaintes futures », a-t-elle ajouté.

De plus, ce rapport aborde les nombreuses violations des droits de l’homme par Israël, l’appelant à mettre fin à son siège de Gaza, à lever les restrictions sur la liberté de mouvement des Palestiniens, à libérer les prisonniers palestiniens – insistant sur les enfants prisonniers et les membres du conseil législatif – entre autres.

« Nous pourrions assister au début de la fin de l’ère de l’impunité », a déclaré Hijab.

Donatella Rovera, qui a dirigé la propre enquête d’Amnesty International (AI) sur ce conflit, a déclaré : « La responsabilité est désormais entre les mains de la communauté internationale, notamment le Conseil de Sécurité des Nations-Unies, en tant que corps le plus puissant de l’ONU, pour entreprendre une action décisive afin de faire endosser la responsabilité aux auteurs et d’apporter la justice aux victimes. »

Elle est d’accord avec la recommandation que le Conseil de Sécurité renvoie les conclusions devant le procureur de la CCI, si Israël et le Hamas n’entreprennent pas des enquêtes crédibles dans une période limitée établie.

Les conclusions du rapport de l’ONU sont cohérentes avec celles du propre champ d’investigation d’Amnesty International sur les 22 jours de conflits.

La plupart des Palestiniens tués par les forces israéliennes étaient des civils désarmés, dont quelques 300 enfants, a dit AI dans une déclaration qui a été diffusée mardi.

Les tirs de roquettes palestiniens ont tué trois civils et six soldats israéliens (quatre autres soldats ont été tués par leur propre camp dans des incidents de tirs israéliens).

« Les forces israéliennes ont également perpétré une destruction délibérée et généralisée de Gaza, laissant des quartiers entiers en ruines, et elles ont utilisé des Palestiniens comme boucliers humains », a déclaré l’organisation qui est basée à Londres.

Aux côtés de Goldstone, un ancien procureur des Tribunaux Criminels Internationaux de l’ancienne Yougoslavie et du Rwanda, l’équipe onusienne comprenait Christine Chinkin, professeur de droit international à la London School of Economics and Political Science, Hina Jilani, avocate à la Cour Suprême du Pakistan et membre de la Commission Internationale d’Enquête sur le Darfour, et le Colonel Desmond Travers, un ancien officier des forces de défense en Irlande et membre du comité de direction de l’Institut aux Enquêtes Criminelles Internationales.

(Inter Press Service)

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]