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Le ton monte entre le Hezbollah et Israël

par Mel Frykberg
Inter Press Service, le 14 juillet 2010

article original : "Rumblings rise between Hezbollah, Israel"

RAMALLAH – Les services de renseignements israéliens ont prévenu qu’une nouvelle guerre avec le Hezbollah sur la frontière nord d’Israël avec le Liban ne peut être écartée, à la suite des tensions accrues entre les forces de maintien de la paix de l’ONU et les supporters du Hezbollah dans le sud du Liban.

« Israël doit être prêt à faire face à toute provocation soudaine ou déclenchement des hostilités », a dit Dan Diker, du Centre de Jérusalem aux Affaires Publiques, à l’agence Inter Press Service (IPS). « De la même manière que la guerre israélo-libanaise de 2006 a été déclenchée à la suite de la capture de soldats israéliens par le Hezbollah ».

En 2006, les francs-tireurs du Hezbollah ont capturé plusieurs soldats israéliens après avoir tendu une embuscade le long de la frontière. Cela a conduit à la deuxième guerre israélo-libanaise, qui dura un peu plus d’un mois, jusqu’à ce que la résolution 1701 de l’ONU mette fin aux hostilités.

Cependant, le Dr Samir Awad, de l’Université Birzeit près de Ramallah, pense que la possibilité d’une confrontation militaire dans un futur proche est mince et que la crise actuelle a plus à voir avec la politique intérieure libanaise.

« A ce stade, aucun des deux camps ne veut la guerre. Tant Israël que le Hezbollah ne sont disposés à payer le prix fort pour un nouveau conflit sanglant. Les événements dans le sud [du Liban] sont liés à une lutte de pouvoir au sein du gouvernement libanais », a déclaré Awad à IPS.

Les services de renseignements israéliens ont rapporté une augmentation du passage clandestin d’armes dans le sud du Liban à travers les frontières poreuses avec la Syrie. Il y a également des rapports d’activité par le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique Iranienne dans la région du fleuve Litani.

La résolution 1701 appelait à ce que cette parcelle de territoire soit tenue par les soldats de la FINUL (Force Internationale des Nations-Unies au Liban) et l’armée libanaise, et que les milices armées (en particulier le Hezbollah) soit désarmées. Israël a été forcé de se retirer, en 2000, de sa « zone de sécurité » auto-proclamée, en conséquence de la résistance du Hezbollah.

Les forces de Défense d’Israël (Tsahal) ont alerté sur l’activité militaire accrue dans le village méridional de Khiam. Elles disent que les cellules du Hezbollah y sont en sommeil en préparation d’une embuscade contre tout soldat de Tsahal qui entrerait dans la zone.

Al-Khiam est d’une importance stratégique particulière. En 2007, une bombe qui aurait été placée par le Hezbollah au bord d’une route a tué six soldats de la FINUL, issus d’un bataillon espagnol. Les Espagnols ont la réputation de se confronter aux cadres du Hezbollah.

Cet attentat à la bombe a été largement perçu comme un message à la FINUL sur la capacité du mouvement de la résistance libanaise à contrôler cette zone. « Le Hezbollah considère le Liban comme une sous-colonie de l’Iran. Affronter la FINUL au moyen de provocations est la façon du Hezbollah de se battre contre ce qu’il considère comme une interférence étrangère dans son pays, et c’est une manière de montrer à l’ONU qui est le patron au Liban », a déclaré Diker à IPS.

Les troupes de la FINUL ont rencontré une résistance accrue dans leur recherche d’armes à Al-Khiam. Au cours des deux dernières semaines, environ 20 affrontements se sont produits entre les villageois chiites et les soldats de la FINUL.

Les villageois, sympathisants du Hezbollah, ont jeté des pierres sur les soldats de la FINUL, saisi leurs armes, sont montés sur leurs chars et, dans un cas, ont enlevé l’antenne d’un des chars. Les armes ont été rendues après l’intervention de l’armée libanaise.

Les relations entre les diverses sectes dans l’armée libanaise ont empiré, alors que l’armée a essayé d’affronter les francs-tireurs du Hezbollah. De nombreux officiers de l’armée libanaise sont chiites et bienveillants à l’égard du Hezbollah.

« Le Hezbollah s’est débrouillé pour garder ses armes en dépit de la résolution 1701 », dit Awad. « Il a également réussi à gagner le soutien contre la coalition gouvernementale du 14 mars, conduite par le pro-occidental Saad Hariri.

« Qui plus est, il continue de se décrire lui-même avec succès comme le libérateur libanais, à cause de l’occupation continuelle des Fermes de Sheba et de la partie nord du village de Ghajar. »

Les Fermes de Sheba ont été déclarées par l’ONU en 2000 comme faisant partie du territoire syrien occupé [par Israël]. Mais, depuis, les Syriens et les Libanais se sont mis d’accord sur le fait que ce territoire appartient au Liban. Un cartographe de l’ONU a concédé que leur point de vue est valable, mais cette question doit encore être résolue.

« Le gouvernement libanais doit reconnaître qu’il perd de plus en plus de pouvoir en faveur du Hezbollah dans le sud [du Liban] et qu’il ne contrôle plus entièrement le pays », a dit Awad à IPS.

Mais une guerre prochaine semble improbable, dit le Professeur Moshé Ma’oz de l’Université Hébraïque de Jérusalem. « Cela a plus à voir avec l’Iran qui met en garde Israël, par l’intermédiaire de son mandataire du Hezbollah, de ne pas attaquer l’Iran. C’est également une question de maintenir une dissuasion réciproque alors que l’Iran et Israël échangent des menaces mettant en garde l’autre camp de ne pas attaquer.

« Mais cela pourrait changer si la Syrie et Israël faisaient la paix », a déclaré Ma’oz à IPS. « La Syrie a laissé entendre un grand nombre de fois qu’elle veut parvenir à un accord avec Israël – évidemment selon ses propres termes. Si cela se produisait, l’Iran pourrait s’immiscer par l’intermédiaire du Hezbollah et interrompre le processus. »

(Inter Press Service)

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]