accueil > archives > éditos


Dites au-revoir aux banques !

Economie : Il est temps de mettre un terme à cette farce

Par Dave Lindorff
CounterPunch, le 7 mars 2009

article original : "It's Time to Put a Stop to This Farce! "

La futilité et la stupidité de la politique de la FED et de l’administration Obama, d’injecter encore plus d’argent dans des banques et des compagnies d’assurance en faillite, dans un effort voué à l’échec afin qu’elles accordent à nouveau des prêts, ont été démontrées – si jamais on y a fait attention – par l’effondrement des ventes d’automobiles, le mois dernier, avec toutes les entreprises les plus importantes, Ford, GM et Toyota, qui ont fait état d’une chute d’environ 40% de leurs ventes.

Cette baisse des achats de voitures s’est produite malgré des réductions record accordées par l’industrie automobile et des offres de financement à 0%. Il est clair que l’obtention d’un financement n’est pas la raison pour laquelle les gens n’achètent pas de voitures.

Les gens n’achètent pas de voitures parce qu’ils sont inquiets de ne plus avoir de travail pour pouvoir rembourser leur crédit.

Les gens n’achètent pas de maisons pour la même raison. Le problème n’est pas d’obtenir un prêt immobilier. Ces jours-ci, il y a plein de petites banques qui seraient heureuses de prêter de l’argent pour acquérir une maison. Mais qui va s’en aller acheter une maison dans la conjoncture actuelle ? Tout d’abord, pour acheter une maison, à moins d’être un primo acquéreur, il faut vendre celle que l’on possède déjà, mais cela implique d’accepter une énorme perte. En effet, une maison sur cinq en Amérique est aujourd’hui techniquement « sous l’eau » - c’est-à-dire, qu’elle vaut moins que le crédit qu’il reste à payer sur la propriété. Il est probable qu’une autre maison sur cinq vaut un peu plus que le solde du crédit hypothécaire. Dans de telles circonstances, personne ne vendrait sa maison.

L’idée est que si les gens ne sont pas prêts à dépenser, alors qu’elle est l’utilité de donner plus d’argent aux banques et à leurs actionnaires, dans l’espoir qu’ils commencent à le prêter ? L’industrie du crédit a deux côtés – ceux qui proposent d’accorder un prêt et ceux qui empruntent. S’il n’y a pas d’emprunteurs, aucune somme disponible pour le crédit ne changera le fait qu’il n’y a pas d’emprunteurs, et donc de prêts à accorder.

A cet égard, le crédit commercial n’est pas différent. En général, les entreprises empruntent pour leur expansion. Lorsqu’une entreprise est en recul, elle n’a pas besoin d’emprunter d’argent, à moins de vouloir la sauver et l’empêcher de faire faillite. Ce que fait une entreprise quand ses marchés se contractent et que ses ventes et ses revenus chutent est de réduire sa production et de licencier ses employés. Elle n’a pas besoin d’emprunter de l’argent pour cela. Bien sûr, si les ventes chutent trop vite, l’entreprise pourrait se retrouver à devoir des salaires à ses employés. C’est vrai. Et dans ce cas, une entreprise pourrait vouloir emprunter afin de remplir ses obligations, mais c’est rarement la sorte de prêt qu’une banque souhaite accorder – à une entreprise mourante incapable de payer les salaires.

Les entreprises empruntent quand elles sont en expansion, parce que c’est un très bon investissement. Si l’on sait que l’on peut gagner 15% de retour sur investissement dans une période de croissance économique et que l’on peut emprunter à 4% pour accroître sa production, alors c’est une bonne affaire. C’est également une bonne affaire pour la banque, puisqu’une entreprise en expansion est une proposition plutôt peu risquée. Le gouvernement central ne devrait pas avoir besoin de faire pression sur les banques pour qu’elles accordent ce type de prêts. Les banques le feraient d’elles-mêmes.

Donc, avec l’économie qui est toujours en chute-libre, avec des entreprises qui licencient les travailleurs américains au rythme de 20.000 par jour, avec le chômage réel qui dépasse les 18% - un travailleur américain sur six est soit sans emploi et cherche un travail, soit sans emploi et a abandonné toute recherche, soit obligé contre son gré de travailler à temps partiel – et avec une érosion de plus de 50% des ressources des ménages, il n’y a tout simplement aucun moyen que les Américains changent leur fusil d’épaule et recommencent à emprunter pour dépenser. Et, vu que l’économie américaine est composée à 72% des dépenses des consommateurs, il n’y a aucun moyen pour que l’économie rebondisse prochainement.

Cela signifie que les centaines de milliards de dollars qui sont déversés dans des entreprises telles que Citibank et AIG sont totalement gaspillés. C’est tout simplement un transfert de richesse inutile et scandaleux du public américain vers les actionnaires de ses sociétés – les mêmes sociétés et les mêmes personnes qui ont provoqué cette catastrophe en premier lieu.

Si l’on veut des preuves de cette futilité, il suffit de vérifier la capitalisation boursière actuelle (la valeur actuelle de toutes les actions d’une société) de Citigroup et d’AIG. Citigroup, en dépit d’avoir reçu 75 milliards de dollars d’argent public en subventions, vaut maintenant 5,4 milliards de dollars – ce qui est moins qu’Autozone, une chaîne de magasins de pièces détachées, et moins que H&H Block, la chaîne de spécialistes franchisés en déclaration d’impôt. Quant à AIG, qui a reçu une subvention effarante de 180 milliards de dollars d’argent public, sa valeur boursière totale est inférieure à un milliard de dollars ! Tout cet argent des subventions a été jeté par la fenêtre et, aujourd’hui, le gouvernement pourrait acheter immédiatement ces deux sociétés, grosso-modo pour la somme qu’elle claque en Irak chaque mois.

Il est temps d’arrêter cette farce.

Pour restaurer l’économie américaine, il ne suffira pas de relancer la dépense des consommateurs ou même les investissements des entreprises. Cela nécessitera de longs et durs efforts convergents pour sortir d’une économie de consommation parasitaire, dans laquelle les profits sont en grande partie réalisés au moyen de la spéculation, pour aller vers une économie réelle qui fabrique réellement les choses dont les gens, à la fois ici et dans le monde entier, ont besoin.

Plus vite on reconnaîtra cette vérité, plus il restera de ressources au gouvernement pour le mettre dans les sortes d’investissements qui peuvent contribuer à ce que cela se produise – des choses comme la création d’emplois, des aides aux revenus, des refinancements de prêts immobiliers et une réforme du système médical qui pourraient aider les Américains à se remettre sur pieds. Evidemment, il serait nécessaire de mettre fin aux guerres à l’étranger et de tailler radicalement dans la dépense militaire.

Lorsque des sociétés comme Citicorp et AIG seront de l’histoire ancienne et lorsque les anciens directeurs de Lehman Brothers, Citibank et AIG, de même que la plupart des hauts gradés du Pentagone, seront dehors à travailler à des services de conservation civile pour restaurer les bassins hydrographiques ou replanter des forêts, nous saurons que le gouvernement a finalement « pigé ».

Traduction : [JFG-QuestionsCritiques]