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La Guerre est finie ! (Si seulement nous le voulions)

De Kant à John Lennon : un conte de Noël

Par Timothy J. Freeman
CounterPunch, le 22 décembre 2007

article original : "From Kant to John Lennon: a Christmas Story"

It was thirty eight years ago today,
that John and Yoko gave us all something to play,
a message that's never really been in style,
though its guaranteed to raise a smile. . . .


Cela fait trente-huit ans aujourd'hui,
Que John et Yoko nous ont donné quelque chose à jouer,
Un message qui n'a jamais été vraiment suivi,
Bien qu'il garantisse un sourire ...

...et peut-être même sauver le monde, si seulement nous avions réellement écouté... Ok, je suis désolé (et je sais que ce n'est même pas une chanson de Lennon).

Grâce à la récente diffusion du film The U.S. vs John Lennon [Les Etats-Unis contre John Lennon], le message simple de la campagne de John Lennon et de Yoko Ono pour la paix, en ce Noël 1969 — devenu plus tard la chanson Happy Xmas (War is Over) [Joyeux Noël (La guerre est Finie)] — n'arrête pas de tourner dans ma tête. A Noël 1969, plus de 47.000 soldats américains avaient déjà perdu la vie au Vietnam et plus de 10.000 autres allaient mourir avant que la guerre ne soit réellement terminée. En sept langues et dans onze villes différentes du monde, Lennon et Ono avaient placardé sur des affiches géantes la déclaration brute suivante : "LA GUERRE EST FINIE !" à condition bien sûr, chuchoté en petits caractères : "Si vous le voulez".

Aujourd'hui, 38 ans plus tard, les Etats-Unis sont embourbés dans la "guerre contre le terrorisme" en Afghanistan et en Irak et aucune fin ne se profile à l'horizon. Malgré la récente Estimation Nationale des Renseignements [NIE] qui réfute la prétendue menace nucléaire iranienne, cette guerre pourrait escalader en une guerre plus vaste et bien plus dangereuse. Le plaidoyer plaintif contenu dans le message de Lennon et Ono peut alors prêter à sourire. Avec le conflit inévitable à venir, au cours de ce siècle, pour les ressources qui diminue — en particulier le pétrole et l'eau — et avec la direction actuelle prise par la puissance étasunienne qui conduira certainement à une confrontation avec la Chine et la Russie, l'idée selon laquelle la guerre pourrait vraiment finir (si seulement nous le voulions) semble terriblement naïve. Au mieux, c'est un idéalisme vieillot, en décalage complet avec les exigences du monde réel. "Il est sûr que c'est une belle pensée", pense probablement la plupart des Américains. "La guerre pourrait être finie, mais seulement s'ILS le voulaient — ces terroristes, ces islamo-fascistes, ces communistes et tous les autres 'istes' qui ne reconnaissent pas la valeur de la liberté et de la destinée de la voie américaine, choisie par Dieu". De toute façon, la guerre fait partie de la nature humaine. Elle en fait partie depuis le début de son histoire et cela ne risque pas de changer. Penser que la guerre pourrait être finie à jamais n'est qu'une utopie (a pie in the sky).[1]

Je suis donc, moi aussi, peut-être terriblement naïf ; mais je n'arrive pas à extraire de ma tête les mots prononcés par John et Yoko — notamment depuis que les enfants du chœur de la communauté de Harlem les ont chantés dans Happy Xmas (War is Over). Cela m'a conduit à la réflexion suivante : La guerre pourrait-elle vraiment être finie si seulement nous le voulions ? Est-il vraiment possible de 'donner une chance à la paix' [Give Peace a Chance].

Donner une chance à la paix ?

Lorsque j'évoque cette question, c'est à l'essai d'Emmanuel Kant, "Vers la Paix Perpétuelle", écrit à la fin du 18ème siècle, que je pense.[2] La philosophie de Kant est en quelque sorte un tournant dans l'histoire de la pensée occidentale, un virage qui a influencé toute les philosophies qui lui ont succédée. On a décrit Kant comme étant à la fois "le personnage culminant et le personnage paradigmatique du Siècle des Lumières en Europe". Le Siècle des Lumières étant ce mouvement intellectuel qui a été remarqué pour sa foi optimiste dans la raison humaine et qui nous a donné entre autres [à nous, les Américains] notre foi en la démocratie.[3] Kant est bien un personnage paradigmatique du Siècle des Lumières, à la fois pour sa défense de la raison contre le scepticisme de Hume[4], nécessitant une théorie de la connaissance qui a révolutionné la compréhension de l'esprit humain, et pour sa morale, fondée sur la conviction que la liberté de choix et d'action, en accord avec ce que dicte la raison, est notre plus haute valeur. C'est cette valeur que Kant tient pour être la définition-même de l'humanité. Il est aussi le personnage culminant du Siècle des Lumières pour avoir tracé les limites de la raison humaine, tant dans sa théorie de la connaissance que dans sa morale. Pour Kant, la liberté de choisir implique la liberté de faire le bien comme le mal et il n'y a donc aucune loi de la nature, ni de dialectique de l'Histoire, qui puisse garantir que le bien triomphera. Cet espoir dépendra toujours du choix des hommes.

Ces deux convictions du Siècle des Lumières, paradigmatiques et culminantes, se dégagent dans le texte de Kant "Vers la Paix Perpétuelle". Cet essai débute par une sorte de calembour, où il nous parle de l'enseigne d'un aubergiste hollandais sur laquelle était écrit 'La Paix Perpétuelle' à côté de la représentation d'un cimetière. Alors que Kant nous dit clairement qu'il n'y a aucune garantie que l'humanité sera capable d'éviter la paix perpétuelle du cimetière, l'essentiel de son essai nous explique que si l'humanité veut réellement une paix durable dans ce monde — si l'humanité veut réellement donner une chance à la paix — c'est ce à quoi les nations du monde devraient s'atteler.

Dans notre époque postmoderne, après le Siècle des Lumières, on pourrait écarter facilement Vers la Paix Perpétuelle, car cet essai dévoile autant la naïveté du Siècle des Lumières qu'il en trahit l'espérance. Malgré tout, les idées avancées par Kant méritent peut-être qu'on s'y attarde un peu et qu'on y réfléchisse, pour déterminer ensuite ce qui leur a barré la route pour ne pas leur donner une chance.

Kant présente les conditions qu'il considère nécessaires pour une paix perpétuelle comme s'il s'agissait d'un traité de paix entre les nations du monde. Ce traité est divisé en deux sections. La première consiste en six "articles préliminaires de la paix perpétuelle entre les Etats", qui doivent être considérés comme des lois prohibitives et qui ont pour but, pas seulement d'éliminer les provocations potentielles pouvant conduire à la guerre, mais d'établir une fédération permanente des Etats, qui fournirait ainsi la loi internationale. Il est évident que c'est là où l'essai de Kant s'est avéré être le plus influent, puisque nous trouvons la première articulation de cette idée qui a donné ses fruits avec la création des Nations-Unies.

Les articles préliminaires de la paix perpétuelle

Pour Kant, trois de ces articles préliminaires devraient être traités comme des lois strictement prohibitives et, si les nations du monde voulaient réellement la paix, les abus qui y sont prohibés devraient donc être immédiatement abolis. Le premier article prohibe tout traité de paix établi avec "une réserve secrète de substances ou de matériels pouvant conduire à une guerre future". Ici, il est facile de comprendre le raisonnement de Kant, puisque tout accord de paix n'a aucune chance de durer si les parties impliquées préparaient en secret une nouvelle guerre d'agression. Bien sûr, nous savons quelle menace pour la paix mondiale représentaient les stocks secrets d'ADM [Armes de Destruction Massive] de Saddam [Hussein], comme nous savons aujourd'hui quelle menace représentent les ambitions nucléaires secrètes des mollahs iraniens. Ah oui ! C'est vrai, elles n'existaient pas et n'existent pas — mais les Américains, du moins, comprennent vraiment quelle menace pour la paix mondiale représentent les préparations secrètes pour les guerres d'agression. Je suppose que la paix peut vraiment avoir une chance si l'ensemble des autres nations mettaient un terme à leur préparations secrètes pour la guerre !! Bien sûr, [les Etats-Unis] sont une nation juste et leurs dirigeants n'auraient jamais l'idée de faire une chose pareille !! Oublions, bien sûr, toutes les préparations secrètes [des Etats-Unis] pour envahir l'Irak, avant même que l'administration Bush ne prenne le pouvoir ! Je suppose que Kant était juste naïf pour avoir inclus cet article dans son traité pour la paix mondiale. Il est effectivement intéressant que Kant reconnaisse que la prohibition des préparations secrètes pour la guerre "apparaîtra certainement académique et pédante" si, "conformément aux idées du 'siècle des lumières' relatives à 'l'opportunisme politique', nous croyons que la véritable gloire d'un Etat relève de l'augmentation constante de sa puissance par quelque moyen que ce soit".

La deuxième chose que Kant recommande d'abolir immédiatement est toute interférence d'un Etat par la force dans la "constitution et le gouvernement d'un autre Etat" (article 5). Cet article, lui non plus, n'est certainement pas difficile à comprendre, puisque les Américains n'accepteraient certainement pas quelque interférence extérieure que ce soit dans leur constitution et leur gouvernement. Je suppose qu'il est facile de voir que la paix pourrait vraiment avoir une chance si les nations du monde pouvaient se mettre d'accord sur cet article. Mais, bien sûr, cela ne semble pas possible dans notre monde et, pour des raisons d'opportunisme politique 'éclairé', les Etats-Unis sont certainement devenus maîtres, au cours du siècle passé, dans l'art d'une telle interférence. Bon, nous pouvons au moins dire que les Etats-Unis ont beaucoup d'expérience sur ce sujet, depuis San Juan Hill et les nombreuses interventions plus récentes en Amérique Latine et en Asie du Sud-Est, jusqu'aux interventions actuelles en Afghanistan et en Irak. Malheureusement, peu d'Américains ont vraiment compris à quoi correspond l'opportunisme politique.

La dernière des lois strictement prohibitives du traité de Kant interdit tout "acte d'hostilité, puisque cela rendrait impossible la confiance mutuelle au cours d'une période future de paix" (article 6). Ici, Kant se réfère explicitement à des choses telles que l'embauche d'assassins et d'empoisonneurs, la rupture de traités et l'instigation de la trahison au sein d'un autre Etat. Mais, à partir de ce que Kant dit, nous pouvons extrapoler pour comprendre qu'il a en tête tout acte d'hostilité qui rendrait impossible toute confiance mutuelle. Une fois encore, cet idée n'est certainement pas difficile à comprendre, bien qu'une fois encore, pour des raisons d'opportunisme politique, les Etats-Unis ont certainement une grande expérience en assassinats et en tentatives d'assassinats, en abrogation de traité et autres actes comparables d'hostilité. Je me demande si le peuple irakien fera jamais encore confiance aux Etats-Unis après la suppression d'une grande partie de leur héritage culturel dans le sillage de la chute de Bagdad, après le palais de la torture d'Abou Ghraïb, après le massacre massif au cours de la guerre civile qui s'en est suivi et à la suite de notre 'libération' de l'Irak. Kant expose que les autres articles préliminaires de la paix perpétuelle "permettent, selon les circonstances, un peu de latitude subjective" et, bien qu'ils "n'aient pas besoin d'être mis en application sur-le-champ", leur exécution ne "devraient pas être reportée à une date inexistante". Le premier de ces articles prohibe l'acquisition d'Etats indépendants comme s'ils étaient une propriété privée (article 2). Je suppose que Kant a trouvé qu'il était peu réaliste d'appeler à une prohibition immédiate de telles acquisitions, puisque la pratique, consistant à acquérir d'autres Etats par le mariage ou d'autres alliances familiales au sein de la classe dirigeante, était répandue dans l'Europe de son époque. Bien sûr, si une telle prohibition devait être intégrée aujourd'hui à tout traité de paix mondial, une latitude considérable devrait être accordée aux Etats-Unis, puisqu'ils sont essentiellement le résultat de l'acquisition de territoires, comme propriété privée, et, au moins dans le cas d'Hawaï, de l'acquisition d'un Etat indépendant. Mais nous pourrions dire que c'est un problème du passé, puisque l'opportunisme politique n'appelle plus à l'acquisition d'Etats indépendants — notamment parce que l'interférence par la force dans la constitution ou le gouvernement d'autres Etats peut être le fait de cet opportunisme.

Les deux derniers articles préliminaires de Kant sont très pertinents aujourd'hui. Toutefois, à cause de l'opportunisme politique, il est toujours très difficile d'imaginer comment ils pourraient être appliqués sur-le-champ, voire même à une date future. Ici, Kant suggère que si les nations du monde voulaient vraiment la paix, alors les armées d'active devraient être progressivement abolies (article 3) en même temps que l'accumulation de dette nationale "en relation avec les affaires extérieures de l'Etat" (article 4). En ce qui concerne l'article 3, Kant prévoit une course à l'armement dans laquelle les Etats chercheront "à se surpasser les uns les autres en armant un nombre illimité de soldats et, puisque les coûts qui en résulteront rendront la paix plus oppressante qu'une courte guerre, les armées porteront en elles-mêmes la cause des guerres d'agression". Kant met même en garde qu'une telle course à l'armement pourrait contraindre les Etats "à monter des attaques préventives". Quelques cent cinquante ans avant Eisenhower, Kant semble avoir anticipé le danger que représente le complexe militaro-industriel : "parce que des trois pouvoirs au sein d'un Etat — le pouvoir de l'armée, le pouvoir d'alliance et le pouvoir de l'argent — le troisième est probablement l'instrument le plus sûr pour la guerre ".

La prohibition de Kant contre le fait de contracter une dette nationale pour des aventures militaires à l'étranger semble peut-être même encore plus presciente. Evidemment, l'aventure "néoconne" en Irak serait complètement inconcevable sans la dette colossale qui a été accumulée.[5] On pourrait croire que Kant avait précisément en tête le cas des Etats-Unis d'aujourd'hui lorsqu'il a expliqué cet article de paix :

Il n'y a aucune cause de suspicion si l'aide pour une économie nationale est recherchée à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Etat (par exemple pour l'amélioration des routes, de nouvelles implantations de villages, le stockage de denrées alimentaires pour les années de disette, etc.). Mais un système de crédit, s'il est utilisé par une puissance comme instrument d'agression contre les autres, montre la forme la plus dangereuse du pouvoir de l'argent. Tandis que les dettes ainsi contractées sont toujours garanties contre les exigences présentes de remboursement (parce que tous les créanciers n'exigeront pas d'être payés en même temps), ces dettes continuent de grossir indéfiniment. Ce système ingénieux, inventé au présent siècle par un peuple industriel, procure des fonds militaires pouvant excéder les ressources de tous les autres Etats réunis. Il ne peut s'épuiser que par un déficit à long terme des impôts, mais qui peut être reporté sur une très longue période en stimulant le commerce et l'industrie à travers le système de crédit. Cela rend ainsi plus facile de faire la guerre, d'autant plus que l'inclination guerrière de ceux qui sont au pouvoir (ce qui semble être une caractéristique intégrale de la nature humaine) est un très gros obstacle sur la voie de la paix perpétuelle. Par conséquent, de telles dettes contractées à l'étranger doivent être prohibées dans un article préliminaire de la paix perpétuelle, autrement, la banqueroute nationale, inévitable à long terme, impliquerait nécessairement divers autres Etats par les pertes consécutives qu'ils n'auraient pas méritées, subissant ainsi dommages publics. Les autres Etats ont donc une justification pour s'allier entre eux contre un tel Etat et ses prétentions.

Les articles irrévocables de la paix perpétuelle

Tandis que les articles préliminaires du traité de Kant alimentent la réflexion sur la possibilité de donner une chance à la paix, c'est avec les articles irrévocables que nous arrivons, je pense, au point essentiel que représente le défi de la paix à notre époque. Ce que Kant dit ici est plutôt influençant, mais d'un autre côté c'est très problématique. La part d'influence est le deuxième article dans lequel Kant expose son idée pour une ligue ou une fédération de nations.

Kant est clairement influencé ici par la théorie politique d'un des premiers philosophes modernes, Thomas Hobbes, à qui nous devons l'idée d'un gouvernement en tant que contrat-social.

Afin d'apporter une justification au contrat-social, Hobbes a conçu une "nature de l'Etat" hypothétique qui serait ce que la société humaine serait sans gouvernement [et donc dans l'anarchie]. Alors que Hobbes avait essentiellement une compréhension pessimiste de la nature humaine — les êtres humains étant déterminés par des mécanismes neurologiques, autrement dit, pour rechercher seulement leur propre intérêt — l'état de nature, ainsi qu'il le concevait, est un état de guerre. Tout le monde aurait donc un droit illimité d'échapper à tout et, par conséquent, chacun vivrait dans le danger et la peur permanente d'une mort violente. La vie de l'homme dans l'état de nature, ainsi que Hobbes l'a fameusement dit, est donc "solitaire, pauvre, horrible, bestiale et courte".[6] C'est donc pour sortir de cet état de nature que les êtres humains choisiraient logiquement de renoncer à ce droit illimité et de former un gouvernement au moyen d'un contrat-social.

Les premiers théoriciens politiques modernes, tels que Hobbes et John Locke, ne s'intéressaient qu'à la formation de l'Etat-nation et n'ont pas étendu leur réflexion à l'arène internationale. L'essai de Kant étend la théorie politique du contrat-social aux relations entre les Etats. Kant commence la deuxième section de son essai en introduisant l'idée d'un contrat-social international :

Un état de paix entre les hommes vivant ensemble n'est pas la même chose que l'état de nature, qui est plutôt un état de guerre. Parce que même si cela n'implique pas d'activités hostiles, cela implique une menace constante que les guerres éclatent. Donc, l'état de paix doit être formellement institué, parce qu'une suspension des hostilités n'est pas en elle-même une garantie de paix.

Ici, Kant suit plus Hobbes que Locke en concevant l'état de nature comme un état de guerre (Locke concevait l'état de nature comme tenant de la loi naturelle et donc pas nécessairement un état de guerre, bien qu'il soit toujours assez incommode de requérir un contrat-social pour sortir de l'état de nature). Kant soutient que si les peuples du monde veulent sortir d'un état de guerre permanent entre les nations, alors les nations du monde devraient former une fédération de nations :

Chaque nation, au titre de sa propre sécurité, peut et doit exiger des autres qu'elles entrent avec elle dans une constitution, similaire à la constitution civile, dans laquelle les droits de chacun seraient garantis. Cela signifierait établir une fédération des peuples.

Kant est clair sur le fait qu'il ne pense pas à un "Etat international" ou à un gouvernement mondial unique. Chaque Etat garde sa souveraineté, de la même façon que les individus gardent leurs droits en rejoignant le contrat-social (Ici, Kant suit plus Locke que Hobbes, en soutenant que les Etats et les individus ont des droits qui ne peuvent être abandonnés). L'argument de Kant est que la seule façon de donner une chance à la paix perpétuelle est au travers d'un tel accord entre les nations :

Mais la paix ne peut être inaugurée, ni garantie, sans un accord général entre les nations ; par conséquent, un type particulier de ligue, que nous pourrions appeler fédération pacifique, est requis. Celle-ci différerait d'un traité de paix en ce que ce dernier met fin à une guerre, alors que cette ligue chercherait à mettre fin une fois pour toutes à toutes les guerres. Cette fédération n'a pas pour but d'acquérir de la puissance, à l'instar d'un Etat, mais seulement de préserver et de garantir la liberté de chaque Etat en lui-même, en même temps que celle des autres Etats confédérés, bien que cela ne signifie pas qu'ils doivent se soumettre aux lois publiques et à une puissance coercitive qui les obligent, comme c'est le cas pour les hommes dans l'état de nature. On peut démontrer que cette idée de fédéralisme, qui s'étend progressivement pour englober tous les Etats, conduisant donc à la paix perpétuelle, est réalisable et que sa réalité est objective.

L'idée de Kant d'une sorte particulière de ligue des nations qui chercherait à mettre fin une bonne fois à toutes les guerres a été évidemment proposée à la Société des Nations à la fin de la première guerre mondiale. Bien sûr, les Etats-Unis n'ont pas participé à la Société des Nations, car le Sénat [américain], contrôlé par les Républicains après l'élection de 1918, a voté contre la ratification du Traité de Versailles. La Société des Nations a pris fin avec le début de la deuxième guerre mondiale, mais elle ressuscita à la fin de la guerre sous la forme des Nations-Unies.

Le problème avec la Société des Nations, de même qu'avec l'institution qui lui a succédée, est qu'il n'y a aucun pouvoir coercitif pour faire appliquer la loi internationale. La réussite de la fédération, ainsi que Kant le fait comprendre, dépend de l'accord mutuel des nations membres. La principale faiblesse des Nations-Unies aujourd'hui est que la nation la plus puissante du monde, dirigée par les néocons de l'administration Bush, a montré un mépris absolu pour les Nations-Unies et qu'ils opèrent clairement comme si l'arène internationale était un état de nature Hobbesien.

Pour Hobbes, il est clair que dans l'état de nature la question de la justice et de l'injustice ne peut même pas être soulevée : "[Il résulte] de cette guerre de tous les hommes contre tous les hommes que rien ne peut être injuste. Les notions de bien et de mal, de justice et d'injustice, n'ont ici aucune place. Là où il n'y a aucun pouvoir commun, il n'y a aucune loi : là où il n'y a aucune loi, il n'y a aucune injustice.[7] Bien que l'Administration Bush ait essayé de justifier ses guerres d'agression auprès du public américain, il est clair, lorsque l'on regarde tout ce qu'ils ont fait lors de la montée en guerre contre l'Irak — au lieu de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour éviter la guerre et trouver une solution pacifique, ils ont fait, en réalité, tout ce qui était en leur pouvoir pour éviter une solution pacifique et trouver une raison pour faire la guerre —, ainsi que leur mépris des Conventions de Genève concernant le traitement des prisonniers durant l'occupation de l'Irak, que leur véritable position est qu'ils n'ont pas besoin de se préoccuper de la question de la justice et de l'injustice et des restrictions de la loi internationale.[8] Voici ce que Kant avait à dire sur les personnes comme ces architectes de la guerre d'Irak qui ont choisi de rejeter la loi internationale et la fédération de nations et de plonger, à la place, les nations du monde dans un état de nature dans lequel le futur de l'humanité risque d'être horrible, bestial et court :

Nous regardons avec un mépris profond la manière dont les sauvages s'accrochent à leur liberté anarchique. Ils préféreraient s'engager dans des conflits incessants plutôt que de se soumettre à une contrainte légale qu'ils pourraient s'imposer à eux-mêmes, parce qu'ils préfèrent la liberté de la folie à la liberté de la raison. Nous considérons cela comme de la barbarie, de la grossièreté et un abâtardissement bestial de l'humanité. Nous pourrions nous attendre à ce que les peuples civilisés, unifiés en Etats, abandonnent le plus vite possible une telle condition dégradante. Mais plutôt que d'agir ainsi, chaque Etat voit précisément sa propre grandeur (car il serait absurde de parler de la grandeur d'un peuple) en n'ayant pas à se soumettre à quelque contrainte extérieure que ce soit. Et son dirigeant tire sa gloire de son pouvoir d'ordonner à des milliers de personnes de s'immoler eux-mêmes pour une cause qui ne les concerne pas vraiment, tandis que ce dernier n'a pas lui-même à encourir quelque danger que ce soit…

Il reste un autre aspect de l'essai de Kant qui nécessite d'être discuté et c'est le premier article irrévocable problématique de sa paix perpétuelle. Kant soutient que pour rendre possible cette fédération de nations il est d'abord nécessaire que la constitution de chaque Etat soit une république. Heureusement, il s'est avéré qu'il n'était pas nécessaire d'attendre que cela se produise pour voter la création des Nations-Unies. Malheureusement, cette nécessité peut être interprétée comme une raison de ne pas prendre les Nations-Unies au sérieux et, de façon encore plus pernicieuse, comme une justification pour des guerres d'agression au nom de la démocratie. Toutefois, l'argument de Kant n'est pas basé sur la supériorité intrinsèque de la république en elle-même (il défend une république supérieure plutôt qu'une démocratie pure, pour la même raison que l'a fait Madison et la raison pour laquelle la Constitution des Etats-Unis est une république — et c'est le danger de la tyrannie de la majorité, qui ne pourrait pas être évité si un vote à la majorité simple décidait de chaque question et que les pouvoirs exécutif et législatif n'étaient pas séparés). L'argument de Kant est plutôt que la guerre serait moins probable si le gouvernement était responsable devant le peuple comme dans une république :

Si, comme c'est inévitablement le cas en vertu de notre constitution, le consentement des citoyens est requis pour décider une guerre, il est très naturel qu'ils aient une grande hésitation à s'embarquer dans une entreprise aussi dangereuse. Car cela signifierait prendre sur eux toutes les misères de la guerre, comme accomplir eux-mêmes les combats, payer pour cette guerre avec leurs propres ressources, réparant dans la douleur la dévastation qui s'en suivrait et, comme mal couronnant le tout, ils devraient porter eux-mêmes le fardeau de la dette qui rendrait la paix amère et qui ne pourrait jamais être remboursée à cause de la menace constante de nouvelles guerres. Mais sous une constitution où le sujet n'est pas un citoyen, et par conséquent pas républicaine, faire la guerre est la chose la plus simple au monde. Car le chef de l'Etat n'est pas un citoyen comme les autres, mais le propriétaire de l'Etat, et une guerre ne le forcerait pas au moindre sacrifice tel que banquets, chasses, palais de plaisirs et festivals de cour. Il peut donc décider de la guerre sans aucune raison spécifique, comme une sorte d'amusement, et laisser imperturbablement au corps diplomatique (qui est toujours prêt pour de tels objectifs) la tâche de justifier la guerre pour la propriété.

Il n'est pas surprenant que ce point ait été beaucoup discuté et, parfois, on a prétendu que le projet de Kant dans son ensemble a été sapé par le déroulement de l'histoire, avec des exemples nombreux de républiques se faisant la guerre les unes contre les autres. Cependant, deux réponses à cette objection ont été offertes. La première est qu'il n'est pas si clair qu'il y ait eu des guerres entre des Etats qui "satisfont réellement la définition hautement rigoureuse de la république formulée par Kant" et, deuxièmement, "on doit toujours se souvenir que Kant n'a jamais soutenu que même une fédération de républiques rend la paix permanente même possible". Le dernier mot de Kant, après tout, est que les êtres humains ont leur libre arbitre et, peu importe qu'ils restent libres de choisir de faire le bien, car ils sont également libres, hélas, de choisir le mal sur le bien".[9] L'exemple donné par les Etats-Unis, au moins au cours des cinquante dernières années, ne contredit pas nécessairement ce dernier point ; cependant, cela soulève la question de savoir si une forme républicaine de gouvernement est suffisante pour protéger une démocratie contre le problème de la tyrannie de la majorité. Je n'imagine pas que Kant ait jamais prévu une république telle que la nôtre, où les gens pourraient être aussi inconscients des coûts réels de la guerre et de ses misères. Ce que Kant dit en amont sur le propriétaire despotique d'un Etat s'applique tout aussi aisément, aujourd'hui, à nos dirigeants à Washington. Quel valeur y a-t-il aujourd'hui dans une république, en ce qui concerne le fait d'éviter des guerres inutiles, si les gens peuvent être aussi isolés des effets dévastateurs de la guerre ?

L'une des raisons principales que les Etats-Unis soient aujourd'hui en Irak est que le peuple américain n'a jamais vraiment appris la leçon de la Guerre du Vietnam. Dès que troupes sont rentrées à la maison et que la protestation a pris fin, les médias contrôlés par les grandes entreprises ont commencé un contre-mouvement réactionnaire qui a plutôt bien réussi à oblitérer la mémoire de ce qui s'est passé au Vietnam. Ceci m'est apparu plus puissamment, l'année dernière, dans l'un de mes cours d'Introduction à la Philosophie Occidentale. Au cours de notre revue sur la question de la morale de la guerre et de la paix, j'ai fait visionner aux étudiants le film The Fog of War [Le Brouillard de la Guerre].[10] Avant de visionner ce film, j'ai dit que la plupart des Américains savent probablement combien d'Américains ont péri dans cette guerre, mais qu'ils ne savent probablement pas combien d'Asiatiques du Sud-Est y ont péri. Je leur ai donc posé la question. Il y a eu quelques minutes de silence et ensuite une jeune femme a levé la main et a répondu en hésitant : "10.000 ?" Cela résume en quelque sorte le problème. Combien d'Américains comprennent qu'il y a eu des millions sont morts et, ainsi que Robert McNamara semble le reconnaître dans The Fog of War — sans réellement aucune bonne raison.[11] Quelle était la raison ? Oh, c'est vrai, tous ces millions de personnes sont mortes afin que nous puissions stopper la propagation du communisme. McNamara admet que les Etats-Unis n'ont tout simplement jamais compris que les Vietnamiens voyaient cela comme une guerre d'indépendance. Les Etats-Unis n'ont jamais assumé la terrible faillite morale que fut la guerre au Vietnam.

Notre "presse libre" contrôlée par les grosses sociétés nous raconte que "l'élan" en Irak se déroule bien. Toutefois, ils ne nous dirons pas ce qui se passe réellement en Irak. La majorité des Américains peut être lasse de la guerre, de la même manière qu'elle est lasse des nouvelles de la veille ; pourtant, les Américains ne comprennent toujours pas quelle véritable faillite morale c'est à nouveau que les soldats étasuniens soient engagés dans une guerre pour aucune bonne raison. La peur du communisme a été remplacée par la peur du terrorisme pour conduire le peuple américain à soutenir une nouvelle guerre inutile. Cela n'aide certainement pas à éteindre le feu du terrorisme que de participer au terrorisme. Lorsqu'on a compris que plus d'un million d'Irakiens ont déjà péri, soi-disant en réponse à la menace du terrorisme et en représailles aux 3.000 morts du World Trade Center, lorsqu'il s'est avéré que l'Irak n'a jamais vraiment été une menace et que les Irakiens n'avaient certainement rien à voir avec l'atrocité du 11/9, alors il faut reconnaître que cette invasion et cette occupation de l'Irak a été, en elle-même, un acte de terrorisme qui éclipse ce qui est arrivé le 11/9. Les Américains sont simplement inconscients des causes réelles du problème du terrorisme comme ils le sont des coûts et des misères réelles de la guerre.

La majorité des Américains veut peut-être faire rentrer les troupes à la maison, mais quelle valeur y a-t-il ici dans notre république si les seuls candidats qui ont une chance d'être élus Président à l'automne prochain ne feront pas rentrer les troupes à la maison et qu'ils se sont engagés à poursuivre la direction générale de la politique étrangère des Etats-Unis ? Quelle valeur y a-t-il ici dans notre république si un candidat comme Dennis Kucinich, le seul candidat qui s'est engagé à donner une chance à la paix et qui comprend ce qu'il faudrait pour y parvenir, est même exclu de participer au débat ?

Combien d'Américains ont la moindre petite idée que c'est l'opportunisme politique qui mène réellement la machine de guerre étasunienne ? Ce n'est certainement pas une défense de la démocratie, alors que nos dirigeants ont été plus que disposés à renverser des dirigeants démocratiquement élus si cela sert l'opportunisme politique — comme l'assassinat d'Allende au Chili aurait dû le rendre clair. Ce n'est certainement pas une défense de notre liberté — ainsi que la Guerre du Vietnam et à présent la guerre en Irak auraient dû le rendre abondamment clair. Cet opportunisme politique qui a fait des Etats-Unis le plus grand obstacle à la paix dans le monde aujourd'hui est tout simplement la préservation et la dissémination d'un système économique qui cherche, par-dessus tout, à maximiser la richesse entre les mains de quelques-uns. L'indemnité de retraite de 400 millions de dollars allouée à l'ancien PDG d'Exxon Corporation en 2005 est peut-être la meilleure illustration de la raison pour laquelle nos troupes meurent et tuent.[12] Dans le siècle à venir, avec des crises sans précédent auxquelles l'humanité sera confrontée, cet opportunisme va au-delà de l'abomination. John Lennon a enfoncé le clou lorsqu'il a déclaré, comme cela a été enregistré dans Les Etats-Unis contre John Lennon, "notre société est dirigée par des gens insensés pour des objectifs insensés".

Ce qui est réellement absurde est que ce Noël, comme tous les Noëls, les églises dans toute l'Amérique seront remplies par ceux qui croient le plus que l'Amérique est une nation juste — ceux qui croient avec le plus de véhémence qu'ils suivent le "Prince de la Paix" — et pourtant ils éliront des gens encore plus insensés pour ces même objectifs insensés et donc la paix n'aura jamais aucune chance. Le problème avec les Etats-Unis est que les Américains n'ont jamais réellement compris qu'elle est la clé de la démocratie. Si l'on devait faire un sondage dans toute l'Amérique et demander à chacun ce qui est plus important, la foi ou l'amour de la sagesse — la capacité de se poser des questions et de penser de façon critique sur les questions importantes actuelles — il n'y a pas beaucoup de doute sur le résultat. Un tel sondage révèlerait la contradiction qu'il y a au cœur-même de l'Amérique. Les premiers colons étaient essentiellement des fondamentalistes religieux qui n'avaient certainement aucune idée de fonder une démocratie. Cette idée est arrivée plus d'un siècle plus tard, durant le pic du Siècle des Lumières. Peut-être était-ce à la fois la Lumière et la plus grande naïveté de Kant. L'espoir que le Siècle des Lumières a placé dans la démocratie et la conviction de Kant qu'une forme républicaine de gouvernement serait le meilleur espoir pour donner une chance à la paix sont fondées sur la supposition que les gens sont capables d'aimer la sagesse — et qu'ils ont donc, pas seulement la liberté de choisir le bien sur le mal, mais le courage et la force de porter le fardeau de la conscience en pensant à travers le problème du bien et du mal. Tous ces Chrétiens qui pensent que la foi est la clé de la démocratie devraient lire la nouvelle de Dostoïevski "Le Grand Inquisiteur" dans les Frères Karamazov. Alors, ensuite, peut-être comprendraient-ils combien, si la foi est aveugle, on peut avoir la foi dans précisément l'opposé de ce que l'on croit être notre foi.

Etant donné l'état des affaires du monde aujourd'hui, il semble certainement naïf qu'une paix perpétuelle puisse être jamais atteinte. Il n'y a certainement aucun espoir pour le plan de Kant d'une paix perpétuelle si la nation la plus puissante du monde ne peut pas retrouver ses sens et établir un meilleur exemple pour les autres nations en suivant les obligations de la loi internationale. Peut-être, juste peut-être, la guerre pourrait être finie — si seulement nous le voulions. Je vous laisse imaginer !

Timothy J. Freeman enseigne la philosophie à l'Université d'Hawaï à Hilo.

Notes

[1] L'origine de la phrase "pie in the sky" vient de la chanson radicale de Joe Hill "Preacher and the Slave de 1911.

[2] Emmanuel Kant, "Vers la Paix Perpétuelle", dans Kant : Ecrits Politiques, 2ème éd., H Reiss, éd. (Cambridge University Press, 1991).

[3] Paul Guyer, "Emmanuel Kant : Introduction," dans Political Philosophy: The Essential Texts. Steven M. Cahn, éd. (Oxford: Oxford University Press, 2005), p. 376. Mon résumé ici est redevable à l'introduction de Guyer sur l'essai de Kant.

[4] David Hume (26 avril 1711 - 25 août 1776), philosophe, économiste et historien fut l'un des plus importants penseurs des Lumières écossaises, avec entre autres Adam Smith et Thomas Reid. Il fut l'un des fondateurs de l'empirisme moderne et l'un des plus radicaux (avec Locke et Berkeley), en réaction à Descartes ; il eut également une influence profonde sur Kant et sur la phénoménologie. Le scepticisme est souvent ce qui est retenu de sa philosophie, notamment lorsqu'elle est comparée au criticisme. (source fr/wikipedia.org)

[5] Voir les coûts de la guerre d'Irak dans le National Priorities Project.

[6] Thomas Hobbes, Le Léviathan, éd. Michael Oakeshott (New York : Macmillan, 1946), ch. 13, p. 82.

[7] Le Léviathan, ch. 13, p. 83.

[8] Voir mes précédents essais où j'ai élaboré ce point : Timothy J. Freeman, "The Terrible Truth about Iraq," CounterPunch, 14 septembre 2003. Timothy J. Freeman, "The Price of Freedom," CounterPunch, 26/27 novembre 2005.

[9] Paul Guyer, "Emmanuel Kant: Introduction" dans Political Philosophy: The Essential Texts, pp. 378-379.

[10] Ce documentaire est l'histoire de l'Amérique vue par l'ancien Secrétaire de la Défense américaine, Robert S. McNamara, personnalité parmi les plus controversées et les plus influentes de la scène politique internationale. A travers son analyse, nous redécouvrons les événements majeurs du XXe siècle.
Du bombardement de 100 000 civils japonais à Tokyo en 1945 au risque imminent de catastrophe nucléaire pendant la crise des missiles cubains, en passant par les effets dévastateurs de la guerre du Vietnam, The Fog of war examine la psychologie et les raisonnements des décisionnaires du gouvernement qui ont envoyé les hommes au combat.
Ce film apporte également une vision essentielle à quiconque souhaite comprendre l'exercice du pouvoir et ses stratégies. Un essai puissant et dérangeant sur la guerre et la nature de l'Histoire... (source Allôciné.fr)

[11] Les documents dé-classifiés par le gouvernement vietnamien en 1995 établissent les pertes totales à 5,1 millions.

[12]http://abcnews.go.com/GMA/story?id=1841989

Traduit de l'anglais (États-Unis) par [JFG-QuestionsCritiques]