Il est Temps pour les Etats-Unis d'Accepter le Résultat
de l'Election Démocratique au Venezuela
CounterPunch, 20 juin 2005,
Pour celui qui est au Venezuela, il est facile de se rendre compte pourquoi personne ne veut suivre Washington dans ces griefs. Il y quelques semaines, je passais devant un immeuble gouvernemental de 22 étages dans le centre ville de Caracas, et j'ai vu environ 200 étudiants qui en bloquaient la sortie pour protester contre le gouvernement.
Piégés à l'intérieur, bien après les heures de bureau, se trouvaient des milliers d'employés, dont des ministres en titre. Quelques policiers étaient là tranquilles sans interférer. Cela a duré des heures. Il n'y eut aucuns blessés ni arrestations.
J'ai pensé à ce qui serait arrivé si des gens avaient fait cela à Washington. On aurait utilisé les gaz lacrymogènes, des bombes de gaz paralysant, il y aurait eu quelques traumatismes crâniens et des arrestations massives. Certains auraient été inculpés pour crime. La protestation se serait terminée en 10 minutes. Le lendemain, j'ai allumé la télé et, sur les plus grosses chaînes, des commentateurs et des experts descendaient en flammes le gouvernement, d'une façon qui n'arrive pas aux Etats-Unis ni même dans la plupart des pays du monde.
A un kiosque, j'ai pris les deux plus importants quotidiens — très remontés contre le gouvernement, une fois encore, sans comparaison possible avec les Etats-Unis.
C'est plutôt difficile d'accuser le Venezuela d'être moins démocratique que les autres pays d'Amérique Latine, et d'ailleurs aucune organisation respectable s'occupant de droits de l'homme n'a essayé de le faire.
L'économie vénézuélienne est florissante, des millions de pauvres ont accès pour la première fois à l'aide médicale et à l'aide alimentaire, et le pourcentage de ceux qui ont confirmé Chavez [lors du dernier referendum] dans ses fonctions a dépassé les 70 % — selon les observateurs de l'opposition.
Pourtant, l'administration Bush persévère dans sa voie solitaire.
Son plus grand embarras s'est produit lors de la réunion de l'Organisation des Etats Américains (OAS) qui s'est tenu ce mois-ci à Fort Lauderdale en Floride, lorsque les Etats-Unis ont échoué à convaincre les autres pays que l'OAS devait contrôler et évaluer la "démocratie" au sein de ses pays membres. Tout le monde a bien compris qu'il s'agissait d'une tentative pour utiliser l'OAS contre le Venezuela, ce à quoi les autres pays ont répondu : "SVP, allez vous battre ailleurs !"
Juste quelques semaines avant cela, le candidat à la présidence de l'OAS, soutenu par les Etats-Unis, perdit contre le ministre chilien de l'Intérieur, José Miguel Insulza, qui lui était soutenu par le Venezuela, l'Argentine et le Brésil. C'est la première fois en 60 ans que les Etats-Unis ne parviennent pas à faire élire leur candidat à la tête de cette organisation continentale. L'équipe de Bush fit pression sur Insulza afin qu'il fasse une déclaration sur les "gouvernements élus qui ne gouvernent pas démocratiquement," ce qui fut perçu comme une attaque contre Venezuela. Mais cela a surtout embarrassé Insulza, plus que tout.
Après leur soutien au coup d'état manqué de 2002, après avoir donné des millions de dollars à l'opposition (y compris à certains qui furent impliqué dans le coup d'état), après avoir financé le referendum pour révoquer Chavez et qui a misérablement échoué l'année dernière - on aurait pu penser que l'équipe Bush saurait quand il faut laisser tomber. Mais eux, ils ne lâchent pas.
Et à présent, un nombre croissant de membres du Congrès américain, à la fois des Républicains et des Démocrates, commencent à douter qu'il soit sage de harasser continuellement notre deuxième partenaire commercial d'Amérique du Sud et notre troisième fournisseur de pétrole.
Cela a commencé lorsque la Secrétaire d'Etat, Condoleeza Rice, dut faire face en janvier, lors de son audition préalable, aux questions hostiles de cinq sénateurs. A présent, la critique se répand dans la Chambre des Représentants. Il faudra bien que notre gouvernement apprenne un jour à respecter les résultats des élections démocratiques au Venezuela — ce qui est tout ce que les Vénézuéliens nous demandent.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par [JFG]