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Wall Street craint la prochaine Grande Dépression

Par Margareta Pagano, Rédactrice en chef de la rubrique Entreprises
The Independent dimanche 16 mars 2008

article original : "Wall Street fears for next Great Depression"

Après le balayage de plus de 300 Mds de dollars [192 Mds d'€] sur les bourses américaines vendredi dernier, suite au financement d'urgence assemblé par la Réserve Fédérale et JPMorgan Chase pour secourir Bear Stearns, Wall Street s'arc-boute en prévision d'une nouvelle semaine boursière en montagnes russes.

Un économiste britannique a prévenu que le monde se trouve désormais tout proche d'une Grande Dépression, du style de celle des années 30, tandis que les opérateurs de la bourse de New York ont dit qu'ils n'avaient jamais connu une telle peur. La première fois que la procédure de financement d'urgence par la Fed a été utilisée, c'était pendant la Grande Dépression ... elle a rarement été utilisée depuis.

Voici ce qu'un opérateur de Goldman Sachs a déclaré à New York : "Tout le monde est en état de choc total, horrifié par ce qui est en train de se produire. Personne ne veut en parler et encore moins faire des opérations boursières ; nous nous contentons de rester là à attendre. Tout le monde est nerveux vis-à-vis de ce qui va émerger lorsque les échanges reprendront demain".

Au Royaume-Uni, Michael Taylor, stratège boursier de premier plan chez Lombard, la société de conseils économiques, a déclaré vendredi soir : "Nous avons tous parlé d'une crise comme celles des années 70, mais, au fur et à mesure que les jours passent, cela ressemble de plus en plus à celle des années 30. Personne n'a la moindre idée où tout cela se terminera ; c'est un désastre qui s'auto alimente". M. Taylor, qui avait été relativement optimiste jusque-là est devenu baissier : "Il semble vraiment que le Royaume-Uni se dirige à présent vers la récession. La crise du crédit signifie que même si la Banque d'Angleterre baisse à nouveau ses taux, les banques sont dans une telle mauvaise passe qu'il est peu probable qu'elles répercuteront ces baisses".

M. Taylor a ajouté qu'il s'attend à un retournement brutal de l'économie réelle britannique alors que les ménages et les entreprises cessent d'emprunter. "Nous n'avons jamais vu quelque chose de semblable auparavant. Ceci est un nouveau domaine pour nous. Des liquidités sont en train d'être injectées dans le système mais les banques ne s'en aperçoivent absolument pas. Tout cela n'est qu'une question de confiance. Plus les banques centrales agissent, plus les banques semblent ignorer ce qui se passe".

M. Taylor a ajouté que les problèmes qui se dénouent à Bear Stearns ne sont que le commencement : "Il y aura plus de banques et plus de fonds spéculatifs qui vont s'effondrer".

L'un des problèmes auxquels les marchés sont confrontés est qu'en dépit de la mesure prise par la Fed la semaine dernière, de leur injecter une autre tranche de 200 Mds de dollars [130 Mds d'€], les banques ne se prêtent plus les unes aux autres.

"Cette crise est une crise de confiance. Nous allons voir encore plus de problèmes surgir dans les fonds spéculatifs, alors qu'ils vont devoir faire face aux appels de marge", a déclaré Mark O'Sullivan, directeur des échanges chez Currencies Direct à Londres. "Ce que nous attendons à présent est que la Fed baisse à nouveau les taux cette semaine. Mais cela a déjà été anticipé par le marché et il est peu probable que ça contribue à restaurer la confiance".

M. O'Sullivan a ajouté que la chute-libre du dollar est partie pour se poursuivre et qu'une réduction des taux européens pourrait être nécessaire pour atténuer la nouvelle force de l'euro par rapport au dollar. "Mais la BCE n'aime pas baisser les taux", a-t-il dit.

Sur l'Europe, M. Taylor a dit que tandis que l'économie allemande reste forte, d'autres, telles que l'Italie et l'Espagne, s'affaiblissent. "On pourrait voir un scénario où la zone euro éclate si les économies continuent d'être aussi préoccupées par l'inflation".

Les marchés financiers européens étaient relativement indemnes de la crise de Wall Street, mais les opérateurs s'attendent à ce qu'il y ait une réaction violente lorsque les bourses ouvriront demain.

Le plan de la Fed donnera 28 jours de financement garanti à Bear Stearns, qui a vu sa valeur considérablement se réduire en une semaine, de plus de la moitié à 3,7 Mds de dollars. JP Morgan fournira le financement, mais la Fed supportera le risque si le prêt n'est pas remboursé. Le président de la Fed, Ben Bernanke, qui a injecté 200Mds de dollars de prêts la semaine dernière vers les institutions à court de liquidités, a dit qu'il en faudrait plus pour aider les autres en détresse.

Traduit de l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]