Vie Publique, Vie Privée
Le candidat français au FMI est un coureur de jupons 'insistant'
Par John Lichfield à Paris
The Independent, le 14 juillet 2007
article original : "French IMF candidate an 'insistent' womaniser"
Le monde médiatique et politique français a été mis en effervescence par une accusation selon laquelle Dominique Strauss-Kahn, le candidat européen pour être le prochain patron du FMI, est un coureur de jupons "insistant".
Cette accusation a été portée dans un blog écrit par le correspondant à Bruxelles du quotidien Libération, Jean Quatremer. Il a dit qu'il y avait un risque que le comportement de l'ancien ministre français des finances vis-à-vis des femmes puisse causer un scandale au siège du Fonds Monétaire International à Washington.
"Le seul vrai problème avec Strauss-Kahn est son attitude envers les femmes". Il est "trop insistant", a écrit M. Quatremer. "Le FMI est une institution internationale avec une moralité anglo-saxonne. Un geste inapproprié, un commentaire malheureux, et il y aura un tollé médiatique."
Le blog de M. Quatremer a été immédiatement attaqué sur le site internet du magazine Marianne pour avoir "franchi la ligne jaune". Il a été aussi critiqué dans un article de son propre journal hier par le commentateur médias, Daniel Schneidermann.
Comment se fait-il, a demandé ce dernier, que des journalistes français se sentent capables de porter de telles accusations sur internet mais pas dans l'édition papier ? Selon la loi française sur la vie privée, il est interdit de discuter des vies privées, même celles des personnages publics.
Toutefois, M. Schneidermann a dit ensuite que la réputation de cet homme politique français, en tant que coureur de jupons, était bien connue. "J'ai… entendu de nombreux rapports, certains de première main, de la part de femmes journalistes" qui ont été sujettes à des "avances" de la part de M. Strauss-Kahn lors d'interviews, a-t-il écrit.
Le cabinet de M. Strauss-Kahn a refusé de faire un commentaire officiel. Un proche conseiller à dit à Marianne : "C'est embêtant mais tout cela n'est pas si grave."
A 58 ans, M. Strauss-Kahn a été recommandé par le Président Nicolas Sarkozy pour le poste bientôt libre de directeur du FMI. Ce choix a été soutenu en début de semaine par presque tous les autres gouvernements européens. On dit que la Grande-Bretagne n'est pas certaine que M. Strauss-Kahn - malgré sa réputation de socialiste français moderne favorable aux marchés - était la bonne personne pour ce poste.
Prenant la défense de son blog, M. Quatremer a déclaré : "J'en ai marre de l'hypocrisie généralisée de la presse française. Un livre récent nous dit que la rupture entre Ségolène Royal et François Hollande a perturbé la campagne de la candidate socialiste. Je pense qu'il est choquant que ceux [dans la presse] qui savaient n'ont rien dit. Les gens ont le droit de savoir."
Il a dit qu'il était un admirateur de M. Strauss-Kahn et que le blog qu'il a écrit avait pour intention de le mettre amicalement en garde. Ni la France, ni M. Strauss-Kahn ne peuvent s'offrir le luxe d'une autre calamité, comme celle de l'épisode de 1991, lorsque l'ancien conseiller du président français, Jacques Attali, quitta la présidence de la Banque Européenne de Développement à Londres, après avoir été accusé de dépenser trop d'argent pour décorer ses bureaux.
M. Schneidermann, le commentateur médias de Libération, a dit que cet épisode indiquait un écart croissant entre internet et la presse écrite ou le journalisme radiotélévisé en France. Les médias traditionnels marchent droit dans la loi protégeant la vie privée et "évitent scrupuleusement" de tels sujets. Le journalisme sur Internet dit ce qu'il a envie de dire, parfois sans enquête adéquate. "Aucune des deux approches n'est entièrement satisfaisante", a-t-il dit.
La question de la loi sur la vie privée opposée au "droit de savoir" du public est devenue une question insistante en France ces derniers mois. Le désaccord entre le Président Sarkozy et sa femme, Cécilia, durant la campagne présidentielle au printemps, n'a quasiment pas été rapporté dans la presse française.
Même les magazines "people" comme Paris-Match sont restés à l'écart du sujet. Toutefois, la semaine dernière, Match a publié des photos de Mme Royal en bikini pendant ses vacances avec sa fille de 15 ans. Celle-ci dit qu'elle prévoit de poursuivre en justice. Le groupe qui possède Paris-Match est contrôlé par Arnaud Lagardère, un proche ami de M. Sarkozy.
© 2006 Independent News and Media Limited / Traduction [JFG-QuestionsCritiques]