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Ségolène gonflée à bloc contre "grand-père" Chirac

Par John Lichfield à Paris

The Independent, le 24 novembre 2006
article original : "Ségolène win fires up 'grandfather' Chirac "

Le Président Jacques Chirac s'est auto-convaincu qu'il est le seul homme politique à pouvoir battre la candidate socialiste, Ségolène Royal, dans l'élection présidentielle de l'année prochaine.

Bien qu'il n'ait pas encore décidé s'il allait briguer un troisième mandat, M. Chirac, qui prend 74 ans la semaine prochaine, est persuadé que seule une "personnalité grand-paternelle" peut battre et mettre fin aux prétentions du "personnage maternel" représenté par Mme Royal.

Une source bien informée du centre-droit français, proche de M. Chirac, a déclaré à l'Independent que la victoire écrasante de Mme Royal dans la "primaire" socialiste, la semaine dernière, lui avait redonné de l'appétit pour le combat politique.

M. Chirac intensifiera donc ses efforts dans les prochaines semaines pour faire trébucher son ministre de l'intérieur et ancien protégé, Nicolas Sarkozy, l'homme qui semble depuis longtemps certain de lui succéder en tant que leader du centre-droit français et candidat pour le parti de la majorité dans les élections du printemps prochain.

Une guerre civile semi-publique fait rage depuis des mois entre M. Sarkozy, d'un côté, et M. Chirac et son Premier ministre, Dominique de Villepin, de l'autre. Une démonstration publique de concorde lors du petit-déjeuné entre M. Sarkozy et M. de Villepin, hier, n'a convaincu personne.

De nombreux hommes politiques du centre-droit ont prédit depuis des semaines que M. Chirac n'avait pas encore dit son "dernier mot" et qu'il tenterait de bloquer, ou d'entraver, la poussée du Ministre de l'Intérieur pour la présidence. Une campagne indépendante "de démolition" par M. de Villepin en printemps prochain semblait être une option probable.

À présent, selon notre source bien placée, M. Chirac s'est persuadé que l'appel de M. Sarkozy s'effondrera devant l'élégance de Mme Royal, son charisme, son conservatisme social et son style vague et non menaçant de socialisme. Le président croit qu'il pourrait par conséquent avoir une chance de se parachuter dans la course l'année prochaine comme la seule personne capable de sauver la droite française de cinq années de "Ségolènisme".

D'autres hommes politiques de centre-droit - à présent essentiellement loyaux à M. Sarkozy - disent que c'est un fantasme, encouragé par des officiels de l'Elysée, qui sont "dans le déni" et sont terrifiés à l'idée de la fin de l'ère Chirac en printemps prochain. Les politiciens pro-Sarkozy montrent du doigt le grand âge du président, ses résultats creux et son impopularité, même auprès de ses anciens supporters.

La semaine dernière, un sondage d'opinion a montré que seulement 1% des électeurs probables du parti de la majorité de M. Chirac, l'UMP, disent qu'ils pensent que le président devrait se présenter à nouveau. M. Sarkozy a recueilli 67% d'opinions favorables.

Néanmoins, M. Chirac s'est auto-convaincu que l'émergence de Mme Royal va bousculer la donne. Au strict minimum, cela lui donne une raison plausible d'ébranler son ancien protégé qu'il déteste. M. Chirac gardera ses options ouvertes aussi longtemps que possible, alimentant l'incertitude sur le centre-droit dans l'espoir de réduire les chances de M. Sarkozy.

"Il pense que les sondages d'opinion dans les prochains jours montreront une forte poussée pour Ségolène", a dit cette source bien placée. "De nombreux électeurs du centre-droit ont des doutes sur Sarkozy. Chirac pense que ces doutes peuvent être aidés à grandir rapidement.

En vertu des règles pour une "primaire" à l'UMP, acceptées mercredi soir, M. Sarkozy semble certain d'être sélectionné comme candidat lors de la conférence du parti le 14 janvier prochain. Il est probable qu'il annoncera officiellement sa candidature cette semaine.

La ministre de la défense, Michèle Alliot-Marie, semble désormais la probable concurrente de M. Sarkozy dans la "primaire" officielle. En échange de sa défaite selon le cérémonial d'usage le 14 janvier, donnant à M. Sarkozy une légitimité supplémentaire, elle espérera un poste important dans un gouvernement de centre-droit.

On s'attend à ce que l'un ou l'autre, de Chirac ou de Villepin, monte une campagne indépendante au début du printemps prochain.

© 2006 Independent News and Media Limited / Traduction [JFG-QuestionsCritiques]