Election présidentielle 2007
L'électorat français se sépare en deux tribus :
les jeunes et les vieuxPar John Lichfield
The Independent, le 8 mai 2007
article original : "French electorate splits into two tribes of young and old"
L'électeur typique de Sarkozy est le commerçant de la soixantaine dans une ville rurale de l'est ou du sud de la France. L'électeur typique de Royal est une jeune étudiante dans une ville de l'Ouest ou du Sud-Ouest.
La division sociologique et géographique de la France en deux tribus, celle des "Sarko" et celle des "Ségo", est fascinante - et échappe à ce qui est communément admis à propos de la campagne présidentielle.
Mme Royal, la candidate socialiste, battue par la Droite comme la candidate du passé, a réalisé un très gros score parmi les jeunes et les moins jeunes (à l'exception des 25-34 ans). Dans une élection qui aurait été restreinte aux électeurs français de 18 à 59 ans, Mme Royal aurait gagné haut la main. M. Sarkozy doit sa victoire à un score écrasant chez les "ridés", avec un triomphe absolu parmi les électeurs français de la soixantaine (61% des voix), et il a touché le jackpot chez les plus de soixante-dix ans (68%).
Le candidat de droite a promis de "remettre la France au travail" et de créer un nouvel avenir plus dynamique. Paradoxalement, là où il a fait son meilleur score, c'est auprès des retraités. Ils ont été séduits, non pas par ses promesses d'une Nouvelle France, mais par ses appels aux valeurs "morales" d'une Vieille France, et en particulier par son discours ferme sur la délinquance, l'immigration et l'identité nationale.
La cassure régionale est, elle aussi, fascinante. Mme Royal est arrivée en tête dans un ensemble de départements du centre, du sud-ouest et de la Bretagne. Elle a aussi gagné dans deux départements de la banlieue Est de Paris et dans le Pas-de-Calais. "Ségoland", dans l'Ouest et le Sud-Ouest, coïncide approximativement avec son propre fief de Poitou-Charente et les bastions traditionnels de Bretagne et du Sud-Ouest. Mais son territoire couvre aussi quelques-unes des villes les plus dynamiques de France tournées vers l'avenir, comme Toulouse, Nantes et Rennes.
M. Sarkozy a réalisé de bons scores en Normandie et dans le Nord, mais c'est dans les anciens bastions de droite, d'Alsace et de la Côte d'Azur, qu'il a fait le plus de voix - jusqu'à 68%. "Sarkoland" couvre les deux-tiers de la France, mais ses fiefs sont les départements "grincheux" définitivement réactionnaires, qui se trouve le long de la frontière Est de la France.
En termes sociologiques, les votes étaient relativement prévisibles. Mme Royal a gagné parmi les étudiants, les employés du secteur public, les ouvriers et les chômeurs. M. Sarkozy a gagné parmi les employés du secteur privé, les petits entrepreneurs, les professions libérales, les agriculteurs et les classes supérieures. Il a gagné de façon absolument écrasante - 82% - parmi les commerçants et les petits commerçants, qui souffrent d'une économie française bureaucratique et lourdement taxée.
Selon le sondage Ipsos, M. Sarkozy a gagné à la fois parmi les hommes et les femmes. Mme Royal a fait mieux (48%) auprès des femmes que des hommes (46%). Les schismes générationnels révélés par ce sondage sont frappants. La génération "internet" des 18-24 ans a voté à 58% pour Mme Royal. Les 25-34 ans ont voté à 57% pour M. Sarkozy. La génération Mitterrand - "Mai 68" des 45-59 ans a voté à 55% pour Mme Royal. Les 35-44 ans sont à 50-50.
Traduction [JFG-QuestionsCritiques]