Elections présidentielles 2007
La gauche française craint une répétition
du fiasco de 2002 tandis que les intentions
de vote pour Bayrou progressentPar John Lichfield, correspondant à Paris
The Independent, le 28 février 2007
article original : "French left fears repeat of 2002 fiasco as Bayrou support grows"
Une victoire surprise sur Ségolène Royal, l'espoir socialiste, est la portée du candidat centriste, François Bayrou, dans le premier tour de l'élection présidentielle. C'est ce que suggère un sondage d'opinion publié hier.
Cependant, selon les instituts de sondage, l'élan en faveur de Bayrou est exceptionnellement "instable". L'électorat français est toujours difficile à sonder et, cette année, son humeur semble particulièrement capricieuse. D'autres sondages récents ont suggéré que le soutien pour Madame Royal se renforce.
A seulement huit semaines du premier tour du 22 avril, plus de la moitié des électeurs n'a pas encore choisi son favori avec certitude. Ce chiffre est exceptionnellement élevé, même pour l'électorat français, connu pour sa volatilité.
Une rafale de sondages d'opinion - 32 en six semaines, par six instituts - a montré des changements rapides et parfois contradictoires dans les intentions de vote. Les journaux français commencent à mettre en doute la fiabilité, le timing et la motivation de certains sondages.
Selon le sondage Ifop pour Paris-Match, qui sera publié en entier demain, M. Bayrou - qui ne recueillait qu'un taux à un seul chiffre il y a un mois - a désormais le soutien de 19% des électeurs du premier tour. Mme Royal chute de deux points à 25,5%.
Cela suggère qu'avec une petite poussée supplémentaire, M. Bayrou - un Démocrate Chrétien pro-européen, faisant campagne pour une coalition de tous les partis pour des réformes modestes - puisse prendre la place de Mme Royal au second tour du 6 mai.
Cela serait une catastrophe pour la gauche française, qui a été humiliée de façon similaire lors de la précédente élection de 2002. A cette occasion, un effondrement du soutien en faveur du Premier ministre socialiste, Lionel Jospin, que les sondages n'avaient pas détecté, permit au dirigeant chevronné de l'extrême droite xénophobe, Jean-Marie Le Pen d'atteindre le second tour.
Cette année, s'il doit y avoir un candidat-surprise - ou un "troisième homme" - il semble plus que probable que ce sera M. Bayrou. Toutefois, la prudence est de mise. Il est fréquent dans les élections françaises que des outsiders relativement inoffensifs connaissent une brusque envolée dans les sondages d'opinion et plongent ensuite avant le jour de l'élection. Selon les sondeurs, une grande partie du soutien de M. Bayrou est incertain et pourrait fondre.
D'un autre côté, M. Le Pen est en général sous-estimé dans les sondages. Actuellement il est crédité d'environ 12%. C'est presque certainement trop bas, en dépit d'ajustements généreux vers le haut de son score "brut", pour prendre en compte le fait que les électeurs de Le Pen mentent souvent aux sondeurs. Cependant, il y a une tendance claire dans tous les sondages, pour l'instant, en faveur de M. Bayrou. Le dernier sondage a été effectué avant sa performance compétente mais plutôt compassée dans le débat en prime-time lundi soir avec un panel de 100 électeurs sur la plus grosse chaîne française de télévision, TF1.
La bonne performance de Mme Royal dans cette même émission, la semaine passée, a inversé son effondrement dans les sondages et donné une nouvelle énergie à sa campagne. Le sondage de Paris-Match est le premier à suggérer qu'elle puisse à nouveau éprouver des difficultés.
Le ministre de l'intérieur, de droite, Nicolas Sarkozy, reste le net favori pour être le prochain président. Après avoir plongé dans les récents sondages, celui de l'Ifop le montre remportant confortablement le premier tour du 22 avril avec 29%. Au second tour, selon ce même sondage, il battrait Mme Royal avec 52% contre 48%.
Toutefois, la montée de M. Bayrou tire la sonnette d'alarme dans le camp de Sarkozy. La brusque montée du soutien pour le candidat centriste - faisant la course comme l'outsider provincial, malgré une vie passée dans la politique nationale - provient en partie des électeurs de centre-droit qui s'inquiètent du discours de "rupture" de M. Sarkozy ou de sa réforme radicale du "modèle social" français. M. Sarkozy préfèrerait un duel au second tour contre Mme Royal, pas contre M. Bayrou.
Traduction [JFG-QuestionsCritiques]