accueil > archives > éditos


Afghanistan

La Campagne contre les Taliban 'engendre misère et faim'

Par Kim Sengupta

publié dans The Independent, le 6 septembre 2006,
article original : "Campaign against the Taliban 'cause misery and hunger'"

Deux groupes de réflexion internationaux ont publié, hier, des rapports soulignant les échecs de la politique étasunienne et britannique en Afghanistan. Ils mettent en garde contre la situation de la sécurité qui se dégrade dans ce pays.

Le Senlis Council affirme que la campagne des forces britanniques contre les Taliban a infligé au peuple afghan, anarchie, misère et famine. Des milliers de villageois fuyant les combats et une sécheresse ininterrompue, ainsi que des paysans ayant perdu leur moyen de subsistance avec l'éradication de leur récolte d'opium, souffriraient de conditions épouvantables dans les camps de réfugiés.

Dans une intervention séparée, l'International Institute of Strategic Studies (IISS) a dit qu'une occasion essentielle avait été perdue parce que l'Occident n'a pas réussi à effectuer un travail adéquat de reconstruction après la guerre de 2001.

Christopher Langton, le responsable du département d'analyse de la défense de l'IISS, a déclaré aussi que les tentatives d'imposer des lois laïques sur une société Pachtoune tribale, sans établir la sécurité, n'avaient pas marché. En même temps, la guerre contre les Taliban a été handicapée à cause des mises en garde imposées par certains pays de l'Otan sur la mission, qui ont conduit à un manque de flexibilité dans les combats.

Le Dr John Chapman, directeur exécutif de l'IISS, a déclaré que les tactiques britanniques consistant à s'installer dans des zones reculées de la province de Helmand avait "agi comme catalyseur de l'insurrection, qui s'est intensifiée, en attirant les Taliban dans un combat ouvert. Cependant, il est aussi vrai que l'insurrection a une énergie nouvelle et que les Taliban voient... les soldats des Etats-membres européens - qu'ils considèrent militairement plus faibles que les Américains - comme des cibles de choix.

"La politique antidrogue et l'éradication des récoltes de pavot ont créé des tensions entre les gens du pays, le gouvernement et la coalition [de l'Otan]. Dans de nombreux endroits, le programme de suppression des moyens d'existence a l'effet inverse de gagner 'les cœurs et les esprits'. Les Taliban capitalisent sur cela... en prenant fait et cause pour les paysans, tout en protégeant ceux (y compris eux-même) qui profitent du commerce de l'héroïne".

Dans son rapport intitulé "L'Afghanistan Cinq Ans Après : Le Retour des Taliban", le Senlis Council déclare que des parties entières du pays retombent entre les mains des Taliban.

Et cette organisation a relevé que de 10 à 15 camps de réfugiés, accueillant jusqu'à 10.000 personnes chacun dans les provinces de Helmand et de Kandahar, reçoivent peu ou pas d'aide des organisations humanitaires.

Voici ce que le directeur exécutif du Senlis Council, Emmanuel Reinert, a déclaré : "Des quantités d'argent colossales ont été dépensées dans de grosses opérations militaires coûteuses. Mais, après cinq années, le sud de l'Afghanistan est une fois de plus le champ de bataille pour le contrôle du pays.

"En même temps, les Afghans sont affamés. Les Etats-Unis ont perdu le contrôle en Afghanistan et ont sapé, de nombreuses façons, la nouvelle démocratie... Je pense que nous pouvons appeler cela un échec. La politique étasunienne en Afghanistan a récréé le havre sûr pour le terrorisme que l'invasion de 2001 avait pour but de détruire".

M. Reinert a déclaré que le Senlis Council soutenait la présence de l'Otan en Afghanistan, mais en soulignant que la mission avait besoin d'être reconsidérée.

Le Foreign Office a réfuté le rapport du Senlis Council. Un porte-parole a déclaré : "Il est assez clair qu'un progrès réel a été fait" [sic].

Pendant ce temps, la nouvelle tombait que le gouvernement pakistanais et les militants pro-Taliban avaient signé un accord de paix. Selon cet accord, il est demandé aux militants de stopper leurs attaques contre les forces militaires pakistanaises dans la province semi-autonome du Waziristân du Nord et qu'ils cessent de traverser la frontière dans l'Est de l'Afghanistan pour attaquer les forces étasuniennes et afghanes. Les troupes pakistanaises, quant à elles, doivent mettre fin, dans cette région, à leur campagne militaire impopulaire.

Traduction [JFG-QuestionsCritiques]