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Kurdistan

Le Premier ministre turc menace d'envahir le nord de l'Irak

Par Patrick Cockburn à Arbil, Irak
The Independent, le 21 juillet 2007

article original : "Turkish PM threatens to invade northern Iraq"

Le Premier ministre turc a menacé d'envahir le nord de l'Irak si, après les élections turques de dimanche, les pourparlers échouent avec l'Irak et les Etats-Unis pour réduire les activités de la guérilla kurde turque.

L'artillerie turque a pilonné de plus en plus lourdement les villages du nord du Kurdistan irakien. Après que trois soldats turcs ont été tués et que cinq ont été blessés par une mine posée par les rebelles du PKK la semaine dernière, quelques 100 obus ont explosé autour de la ville frontalière de Zakho, obligeant les habitants à fuir. Le Premier ministre turc, Recep Tayyib Erdogan, a dit que les combattants du PKK utilisaient le nord de l'Irak comme base pour lancer des attaques.

Il a déclaré qu'il y aurait une rencontre tripartite avec les Etats-Unis et l'Irak après les élections, mais si les exigences de la Turquie n'étaient pas satisfaites, une invasion serait à l'ordre du jour. "Tout ce qui est nécessaire pourrait être fait immédiatement", a-t-il déclaré. "Nous sommes parfaitement capables de le faire." La ligne dure de M. Erdogan s'adresse aux élections turques de demain dans lesquelles son Parti pour la Justice et le Développement (l'AKP) craint de perdre des voix parce qu'il est décrit comme n'agissant pas avec assez de fermeté contre la guérilla du PKK. Il veut empêcher le Parti Nationaliste d'extrême droite, qui exige une incursion en Irak, d'obtenir 10% des voix dont il a besoin pour siéger au parlement.

Le PKK a environ 4.000 combattants qui se cachent dans les montagnes du nord de l'Irak. Il a accru ses attaques dans le sud-est de la Turquie à majorité kurde, mais ce sont des coups d'épingle alors que la Turquie a 250.000 soldats dans la région. Néanmoins, la manière de traiter avec le PKK est devenue la question centrale de ces élections.

Le gouvernement irakien à Bagdad et le puissant Gouvernement Régional du Kurdistan (GRK) semi-indépendant prennent les menaces de la Turquie au sérieux.

Les dirigeants kurdes irakiens font peu de cas d'une invasion turque qui réussirait quoi que se soit contre les forces insaisissables du PKK. Safin Dezayi, expert sur la Turquie et porte-parole du Parti Démocrate du Kurdistan du président du GRK, Massoud Barzani, a déclaré : "La politique turque d'une intervention militaire ici a échoué depuis 20 ou 25 ans. Ils ont traversé la frontière en 1992, 1995 et 1997 et n'ont rien obtenu".

Mais le PKK n'est pas la seule préoccupation de la Turquie. Parmi les autres préoccupations, il y a le développement du GRK en tant que plus proche entité que les Kurdes ont jamais eue vers un Etat indépendant. Les Kurdes sont très puissants au sein du gouvernement de Bagdad et font pression pour un référendum, que la constitution irakienne a décrété qu'il doit avoir lieu au nord de l'Irak, d'ici la fin de 2007, en vertu duquel la province pétrolière de Kirkuk pourrait voter pour rejoindre le GRK.

La menace turque d'invasion place les Etats-Unis dans une position difficile. Les Kurdes sont les supporters principaux des Américains en Irak. La Turquie est aussi, depuis longtemps, un allié stratégique des Américains. "Les Etats-Unis disent aux Turcs de ne pas venir", dit le Dr Mahmoud Othman, un dirigeant kurde de longue date. "Mais s'il y a un conflit entre la Turquie et les Kurdes, alors les Etats-Unis soutiendront la Turquie". Pour essayer d'éviter une guerre, les Etats-Unis font pression sur le GRK pour qu'il agisse contre le PKK.

Après les élections, le gouvernement turc pourrait ressentir qu'il n'a pas d'autre choix que de lancer au moins une incursion limitée. Les Kurdes irakiens s'inquiètent de la profondeur de l'invasion des troupes turques et quand ils se retireront. Si cette invasion se produit, il sera difficile de maintenir stationnés à Bagdad les soldats kurdes, qui forment la partie la plus fiable de l'armée irakienne.

Traduction [JFG-QuestionsCritiques]