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4ème Rapport du GEIC

Réchauffement planétaire : Le cercle vicieux

Par Steve Connor, Rédacteur en chef scientifique

The Independent, le 29 janvier 2007
article original : "Global Warming: The vicious circle"


© 2007 - The Independent/QuestionsCritiques

Les effets des émissions humaines de gaz carbonique se font sentir sur tous les continents habités du monde, avec des variations climatiques très importantes répondant désormais visiblement à l'activité humaine.

Voici les principales découvertes de l'étude la plus intensive sur le changement climatique faite par les 2.000 principaux climatologues du monde. Ils concluent qu'il n'y a plus beaucoup de doute, désormais, que l'activité humaine est en train de changer la face de la planète.

Voici ce que les scientifiques ont découvert : les émissions de gaz à effet de serre dues à l'activité humaine sur les dernières 35 années, en plus d'accroître les températures à la surface du globe, ont un lien avec l'augmentation significative de la température des océans, l'augmentation du niveau de la mer et la fonte spectaculaire de la banquise arctique.

L'avant-projet du quatrième rapport du Groupe d'Experts Internationaux sur le Climat (GEIC) dit qu'une augmentation de 2 à 4,5° degrés de la température mondiale est pratiquement inévitable. Toutefois, ce qui ne présage rien de bon, ce rapport dit aussi qu'aune augmentation de 6° "ou plus" ne peut pas être écartée.

La version définitive du dernier rapport du GEIC sera publiée vendredi prochain, mais un avant-projet, vu par l'Independent, montre clairement que le changement climatique pourrait être bien pire que ce que l'on pensait jusqu'à présent, à cause des répercussions "positives" potentiellement désastreuses qui pourraient accélérer la montée des températures.

Un monde plus chaud accroît l'évaporation des océans, causant des concentrations en vapeur d'eau dans l'atmosphère, un agent puissant de l'effet de serre, qui s'est accrue de 4% au-dessus de la mer depuis 1970. La vapeur d'eau dans l'atmosphère exacerbe l'effet de serre. C'est la répercussion positive la plus importante identifiée dans ce rapport, qui détaille pour la première fois l'inquiétude du GEIC sur les incertitudes - et les dangers - des cycles de répercussion qui pourraient rapidement accélérer le changement climatique.

Tous les modèles climatiques utilisés par le GEIC ont découvert aussi que l'élévation des températures mondiales érodera la capacité naturelle de la planète à absorber le CO2 produit par l'activité humaine. Cela pourrait conduire à des concentrations en CO2 dans l'atmosphère de 44% supplémentaires, faisant monter la température moyenne mondiale de 1,2° d'ici à 2100.

Le Quatrième Rapport d'Estimation de l'IPCC ira plus loin que les trois précédents rapports en faisant le lien entre les signes évidents du changement climatique global et les augmentations des émissions de CO2 et des autres gaz à effet de serre dues à l'activité humaine depuis le début de la Révolution Industrielle.

"La foi dans l'estimation des contributions humaines aux récents changements climatiques a augmenté considérablement depuis le Troisième Rapport d'Estimation", dit le projet de rapport. Cela est dû aux signes plus forts du changement climatique qui se dégagent des données et des observations scientifiques plus longues et plus détaillées, y est-il dit.

Le "signal anthropogénique" - les signes visibles de l'influence humaine sur le climat - apparaît désormais non seulement dans les températures à la surface du globe, mais aussi dans les températures de tous les océans et dans leur teneur en chaleur, dans les températures terrestres extrêmes et dans la diminution rapide de la banquise arctique. "Le réchauffement anthropogénique du système climatique est généralisé et peut être détecté dans les observations de température prises à la surface, dans l'atmosphère libre et dans les océans", dit le projet de rapport. "Il est hautement probable [plus de 95% de probabilité] que le réchauffement observé au cours des cinquante dernières années ne peut être expliqué sans le forcing [d'une activité humaine] extérieure."

Le rapport ajoute que le réchauffement climatique de ces cinquante dernières années aurait été pire s'il n'avait été contrebalancé par l'influence des émissions de polluants aérosols dus à l'activité humaine, ces minuscules particules portées par le vent qui réfléchissent la lumière du soleil pour causer le refroidissement de l'atmosphère. "Sans cet effet de refroidissement des aérosols atmosphériques, il est probable que les gaz à effet de serre auraient, à eux seuls, causé une plus grande augmentation moyenne des températures mondiales que celles observées pendant les cinquante dernières années", dit le projet de rapport.

"La disparition hypothétique de la totalité du poids actuel des particules aérosols anthropogéniques de sulfate produirait une augmentation rapide d'environ 0,8° des températures moyennes mondiales, en une décennie ou deux."

L'IPCC dit qu'au cours du siècle à venir nous risquons fort de voir de gros changements dans le système climatique terrestre. Notamment :

* Les vagues de chaleur, comme celle qui a affecté l'Europe septentrionale durant l'Eté 2003, seront probablement plus intenses, dureront plus longtemps et seront plus fréquentes.

* Les tempêtes et les ouragans tropicaux risquent d'être plus violents, avec des pluies plus fortes et des tempêtes côtières inondant le littoral.

* L'Arctique sera probablement entièrement dégelé en Eté et les glaciers de montagne, les calottes glacières et les banquises continueront de fondre.

* Le niveau de la mer s'accroîtra de manière significative même si les niveaux de CO2 sont stabilisés. D'ici à 2100, le niveau de la mer pourrait être de 43cm plus élevé en moyenne qu'actuellement et d'ici 2300 il pourrait l'être de 80cm.

* Enfin, l'IPCC démolit le canard des sceptiques du climat qui prétendent que le réchauffement climatique est un mythe ou le résultat de la variabilité naturelle du climat : les facteurs naturels ne peuvent être pris en compte pour le réchauffement observé, dit l'IPCC.

"Ces changements se sont produits à un moment où des facteurs forçant non-anthropogéniques (comme la somme des forcings solaire et volcanique) aurait dû produire un refroidissement, pas un réchauffement.

"Il y a une foi croissante que la variabilité interne naturelle ne peut pas être prise en compte pour les changements observés, notamment grâce aux études améliorées qui démontrent que le réchauffement s'est produit à la fois dans les océans et dans l'atmosphère, avec une observation de perte de masses glacières".

Ce rapport, dont le premier projet a été formulé l'année dernière, sera rendu public vendredi à Paris.

Découvertes majeures du quatrième rapport d'estimation de l'IPCC

* Les températures globales continuent de croître avec 11 des 12 années les plus chaudes depuis 1850 ayant eu lieu depuis 1995. Les modèles informatiques suggèrent une augmentation supplémentaire d'environ 3° d'ici à 2100, avec une augmentation de 6° ne pouvant être écartée.

* Il est quasiment certain (la probabilité est supérieure à 99%) que les niveaux de gaz carbonique et le réchauffement climatique sont très au-dessus de la fourchette de variabilité sur les derniers 650.000 ans.

* Il est quasiment certain que l'activité humaine a joué un rôle dominant dans la cause de l'augmentation des gaz à effet de serre sur les 250 dernières années.

* Les émissions d'origine humaine des polluants aérosols atmosphériques ont eu tendance à contrer le réchauffement climatique, qui aurait autrement été significativement pire.

* L'effet net des activités humaines au cours des 250 dernières années a très probablement exercé une influence de réchauffement sur le climat.

* Il est probable que l'activité humaine est aussi responsable des autres changements observés du système climatique terrestre, tel que le réchauffement des océans et la fonte de la banquise arctique.

* Le niveau de la mer continuera de croître pendant le 21ème siècle, à cause de l'expansion thermique des océans et de la réduction des glaciers terrestres.

* Selon certains modèles informatiques de prévision, le réchauffement prévu du climat, causé par les augmentations de gaz carbonique au cours du 21ème siècle, produira probablement la fonte totale de la couverture glacière du Groenland au cours des mille prochaines années.

* Le courant chaud du Gulf Stream de l'Atlantique Nord ralentira probablement au cours du 21ème siècle à cause du réchauffement planétaire et de la fonte d'eau douce enfermée dans la couverture glacière du Groenland. Mais aucun modèle ne prédit l'effondrement de ce courant chaud d'ici à 2100.

Traduction [JFG-QuestionsCritiques]