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     Boucher les trous dans le récit sur le 11/9
    Par Robert Scheer
Truthdig, dimanche 10 septembre 2006

article original : "Gaping Holes in the 9/11 Narrative"



Le Vol 175 de United Airlines se crashe dans la tour sud du WTC, le 11/9/2001, causant une explosion massive. Photo: AP

Cinq ans après les attaques, pourquoi en savons-nous toujours si peu sur ce qui s'est réellement passé ce jour-là? Ce que nous ne savons toujours pas sur le 11/9 pourrait nous tuer. Par "nous", j'entends le public qui a été maintenu dans l'obscurité pendant cinq ans par un président qui connaît peut-être la vérité mais qui a choisi de l'ignorer. Au lieu de se colleter les origines épineuses de ce désastre, George Bush a volontairement détourné l'attention et les ressources de la nation vers une aventure impériale désastreuse en Irak, qui n'avait aucun rapport.

À quel point cela était sans rapport vient d'être définitivement établi vendredi dernier avec la publication tardive du deuxième rapport de la commission sénatoriale sur les Services d'Intelligence, qui a conclu que non seulement il n'y avait aucun lien entre Saddam Hussein et al-Qaïda, mais que l'Irak était le seul pays de la région d'où Oussama ben Laden ne pouvait opérer.

Malheureusement, ceci n'était pas vrai, ni du Pakistan, ni de l'Arabie Saoudite, les deux pays qui avaient reconnu, sinon soutenu, le gouvernement Taliban qui accueillait ben Laden lors de la dernière ligne droite avant le 11/9. Quinze des 19 pirates de l'air venaient d'Arabie Saoudite et, pourtant, aucune enquête sérieuse n'a eu lieu sur le rôle étendu de la famille royale dans le recrutement des "soldats" de ben Laden et la facilité avec laquelle ils ont obtenu des visas légaux pour entrer aux Etats-Unis.

Tandis que les fonds pour al-Qaïda émanaient du royaume saoudien, l'essentiel de son soutien logistique provenait du Pakistan. Aujourd'hui, cinq ans après, ben Laden et les rescapés de son organisation sont supposés, selon les Etats-Unis, avoir trouvé refuge dans la région tribale anarchiste du Pakistan [le Waziristân], où le gouvernement pakistanais vient d'y réduire ses forces, admettant qu'il ne pouvait vaincre les membres de cette tribu bienveillante vis-à-vis des Taliban.

Il n'y a pas eu non plus de compte-rendu crédible du rôle de la communauté des services d'Intelligence du Pakistan, ni à l'époque, ni aujourd'hui, dans son soutien aux terroristes islamiques des deux côtés de la frontière pakistano-afghane. Et quid du transfert de secrets nucléaires du Pakistan, auquel Bush fait allusion en parlant d' "Etats voyous" ?

Souvenez-vous que le prétexte prédominant pour envahir l'Irak était l'affirmation que Saddam Hussein avait des armes de destruction massive et qu'il aurait été d'accord pour les passer aux régimes voyous et aux crapules terroristes. Non seulement de telles armes n'ont pas été trouvées, mais comme l'attestent les comptes-rendus des anciens initiés de l'Administration et ceux de la Commission Sénatoriale sur les Services d'Intelligence, il est clair que l'administration Bush a trié méticuleusement les témoignages afin d'étayer sa charge falsifiée [contre l'Irak].

Des armes de destruction massive étaient acheminées vers les "Etats voyous", mais elles provenaient du Pakistan, dans un programme de grande envergure dirigé par Abdul Qadeer (A.Q.) Khan, le père de la "bombe islamique". Le gouvernement pakistanais a admis que Khan avait passé à la Corée du Nord, à la Libye et à l'Iran, le savoir-faire technologique et les matériaux essentiels pour la fabrication d'armes nucléaires. Mais Khan fut absous de tout crime par le général-dictateur du Pakistan, Pervez Musharraf. Khan n'est restreint qu'à une forme approximative d'assignation à résidence et n'a jamais été mis à la disposition des enquêteurs étasuniens. Pourtant, l'Administration Bush a laissé tomber les sanctions, imposées à l'origine au Pakistan en représailles à son développement d'armes nucléaires, en échange du soutien du Pakistan à la "guerre contre le terrorisme".

Quant à l'Afghanistan, les Taliban sont en train de reprendre du poil de la bête. La semaine dernière, les commandants de l'Otan ont requis d'urgence un plus grand nombre de soldats et ce pays est à présent déchiré par l'anarchie du narco-Etat qui fournit 92% du marché mondial de l'héroïne et qui génère des profits massifs tant pour les gangsters que pour les terroristes. Ce pays est désormais aussi dangereux que l'Irak pour les soldats américains.

En dépit de ce passé navrant de négligence de l'Asie du Sud-Ouest et de création d'un bourbier et d'un avant-poste pour le terrorisme en Irak, Bush a une fois de plus affirmé avec arrogance que sa politique nous a rendus plus sûrs, alors même qu'il a miné nos libertés intérieures et qu'il s'est moqué des engagements des Etats-Unis à la loi internationale, en particulier en ce qui concerne le traitement des prisonniers.

La semaine dernière, Bush a admis qu'il y avait vraiment des prisons secrètes de la CIA, en finissant par annoncer que le groupe de "témoins-clés" du désastre du 11/9 serait déplacé à Guantanamo et que, pour une fois, des visites de la Croix-Rouge et une représentation légale minimale leur serait accordées. Certains d 'entre eux ont été interrogés en secret pendant jusqu'à cinq ans, avec l'Administration Bush laissée comme interprète unique de ce qu'ils ont révélé.

Après cinq années de tromperie officielle, il n'est pas difficile de croire que l'isolement de ses prisonniers trouvait sa justification plutôt dans l'effort de gérer politiquement le récit rendu public que dans celui d'apprendre la vérité à propos du 11/9.

Il y a des preuves flagrantes que c'est la première option qui est la vérité. Le rapport de la Commission sur le 11/9 contient, page 146, un encart de mise en garde. Il y est déclaré que, dans ce rapport, le compte-rendu de ce qu'il s'est passé le 11/9 se basait, dans une très grande mesure, sur ce que ces témoins-clés sont supposés avoir déclaré aux interrogateurs ; et, que les commissaires n'étaient pas autorisés à rencontrer les témoins ou leurs interrogateurs.

"Nous avons soumis des questions afin qu'elles soient utilisées dans les interrogatoires, mais nous n'avions aucun contrôle pour savoir si ou comment des questions d'un intérêt particulier seraient posées. Nous n'étions pas non plus autorisés à parler aux interrogateurs pour que nous puissions mieux juger de la crédibilité des détenus et clarifier les ambiguïtés de ce rapport".

Bref, la source la plus citée dont nous disposons sur ce qui s'est passé le 11/9, le très célèbre Rapport de la Commission sur le 11/9, a été orchestré par l'administration Bush, tout comme elle a contrôlé et falsifié tant d'autres informations.

À la lumière de ce passé navrant de l'exploitation propagandiste de la tragédie du 11/9 dans un objectif politique partisan, doit-on s'étonner qu'un grand nombre d'Américains aient des doutes sur tout cela et qu'une industrie considérable de documentaires et de rapports d'investigation aient surgi, avec des théories alternatives allant du possible à l'absurde ?

Si nous [le site truthdig] offrons quelques exemples des meilleurs travaux de ce genre, ce n'est pas tant que nous les validons mais plutôt parce qu'il y a tant de raisons de mettre en doute la "vérité", telle que l'Administration Bush l'a présentée.

Traduit l'anglais par [JFG-QuestionsCritiques]