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    Tuerie de Toulouse : L'odieuse récupération !
    Jean-François Goulon
le 21 mars 2012


Tous les citoyens français décents s'accordent sur le fait que le massacre qui s'est produit devant le collège-lycée Ozar Hatorah de Toulouse est un acte monstrueux - comme tous les crimes à caractère raciste, fondamentaliste, pédophile ou commis de sang-froid contre des innocents. Le fait que ce soient des enfants juifs et leur professeur qui aient été pris pour cible ne change rien - ou plutôt ne devrait rien changer.

Et pourtant, cela change tout. Jamais une telle unanimité dans les médias pour consacrer pratiquement 100% du temps d'information à cette triste affaire. Et occulter les autres informations, à commencer par celles liées à la campagne électorale.

Plutôt que de diffuser en boucle 24h/24 et sur toutes les chaînes françaises d'information ce dernier crime monstrueux de Toulouse, le PAF aurait peut-être été bien inspiré de rappeler que des enfants meurent chaque jour - dans l'indifférence totale - qui de faim en Somalie, qui sous les tirs de l'armée israélienne à Gaza ou qui en Syrie dans l'abominable répression des forces spéciales de Bachir el-Assad ?

L'assassinat de quatre soldats, à Montauban et à Toulouse, dont l'un se trouve entre la vie et la mort, n'a pas mérité dans un premier temps plus que quelques gros titres de la presse et dans les journaux télévisés. Le cadavre d'une adolescente de 14 ans, assassinée dans la nuit de dimanche à lundi et retrouvé près de Nantes dans des toilettes publiques, n'a pas mérité non plus un tel acharnement médiatique. Les perroquets et les perruches de service obéissent au doigt et à l'oeil et le petit doigt sur la couture aux injonctions de leurs maîtres. Il est regrettable que l'on fasse deux poids deux mesures dans le traitement de l'information selon les circonstances.

Suspendre la campagne électorale, à l'initiative du président-candidat Nicolas Sarkozy, au moment même où celui-ci se trouve en difficulté et où son challenger socialiste fait du sur-place, autorise à se poser quelques questions. Depuis trois jours, on n'aura jamais autant vu le président sortant sur toutes les chaînes de télé. Et François Hollande tente comme il peut de lui coller aux talons, mais se retrouve relégué loin derrière par les médias. Bonne nouvelle pour Sarkozy : le CSA ne décomptera pas ce temps d'antenne sarkozyste dans le cadre de la campagne électorale officielle où le temps de parole de chaque candidat doit bénéficier d'une stricte égalité.

Pourtant, le candidat-président n'aura jamais été autant en campagne. Il a réussi le tour de force à faire pointer du doigt par ses relais médiatiques le candidat François Bayrou qui n'a pas interrompu sa campagne, alors qu'il voudrait bien faire disparaître ce dernier sur le plan politique. Il a également réussi à faire oublier le rassemblement de plus de 100.000 personnes à la Bastille, dimanche dernier, organisée par Jean-Luc Mélenchon, lequel a réuni près de trois fois plus de monde qu'au grand raout sponsorisé de l'UMP à Villepinte.

Il ne fait aucun doute que le président sortant Nicolas Sarkozy fait tout pour surfer sur cet odieux fait divers - il envoie même son ministre des affaires étrangères en Israël pour l'inhumation de ces quatre ressortissants (désormais) israéliens.

Ouf, l'auteur présumé de ces crimes serait en cours d'interpellation ! Bravo à la police qui a accompli sa tâche avec une rapidité extraordinaire. Toutefois, on peut regretter que la célérité de la police ne soit pas toujours aussi évidente !

Par le passé, d'autres faits divers ont émaillé d'autres campagnes présidentielles. On se rappellera la tuerie de Nanterre, le 27 mars 2002, moins de quatre semaines avant le fameux premier tour du 21 avril. Cette tuerie n'avait pas donné lieu à un tel battage médiatique et à une telle « mise entre parenthèse » de la campagne électorale d'alors. Pourtant, huit élus y avaient perdu la vie. On se souviendra que le coupable se défenestra opportunément du Quai des Orfèvres où il était interrogé et que la police rapportera que celui-ci était un militant écologiste, ancien du PS. La suite est connue : Jean-Marie Le Pen affrontera Jacques Chirac au second tour.

Cette fois-ci, ce crime a été opportunément commis au lendemain de la formidable reprise de la Bastille organisée par le candidat Jean-Luc Mélenchon. Pas un mot sur cet évènement dans les médias pour cause de parenthèse. Toujours pendant cette « trêve médiatique électorale », Jean-Claude Gaudin, le Maire UMP de Marseille a refusé d'autoriser le rassemblement du Front de Gauche sur l'une des plages du Prado, prétextant que les rassemblements militants n'y avaient pas leur place. Nous verrons dans les prochains jours si les médias rapportent le grand mensonge de Gaudin, puisqu'en août 2007, la caravane UMP s'y était arrêtée et que Jean-Claude Gaudin lui-même s'en était félicité.

Vivement que cette affaire se termine et que l'on tourne la page de cette parenthèse !

La campagne électorale doit reprendre au plus vite, alors que 4 semaines et demie nous sépare du premier tour. .



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