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Dérégulation Barroso

par Gilles Savary

député européen
vice-président de la commission transport et tourisme


Strasbourg, le 27 septembre 2005 -

Il n'est pas contestable de vouloir légiférer mieux, mais en Europe cela signifie d'abord légiférer "européen", c'est-à-dire dans les domaines où l'Europe peut apporter une véritable plus-value, inaccessible aux Etats membres. A cet égard, la "dérégulation Barroso" qui propose de renoncer à, ou de suspendre, 74 textes pour la plupart en cour de procédure législative, présente tous les symptômes d'une reddition de la Commission européenne devant le Conseil des ministres.

Pour de nombreux textes, il s'agit d'un renoncement à une législation incontestablement utile au niveau européen: les stocks de cabillauds, de civelles et de harengs qui ne s'embarrassent guère des frontières, se trouvent-ils subitement reconstitués par la magie de Barroso?

La sûreté nucléaire des Européens se verra-t-elle améliorée par l'abandon du projet de texte sur la gestion des déchets radioactifs?

Les conditions de travail des chauffeurs routiers, obligés de se garer en masse aux ex-postes frontières, ont-elles à gagner au retrait du projet d'harmonisation européenne des interdictions de circuler les week-ends pour les poids-lourds?

La sécurité juridique de nos mutuelles se trouvera-t-elle renforcée face au droit de la concurrence par le renoncement à leur définir un statut européen? Assurément non.

En réalité, après la "pause" du projet de Constitution européenne, le blocage du budget, ce toilettage juridique de la Commission participe plutôt d'un lent détricotage de l'Europe communautaire.

La Commission s'avère infiniment plus conciliante avec le Conseil des ministres qu'avec le Parlement européen, auquel elle n'a pas hésité à asséner, quelques mois après son rejet, un nouveau projet de directive sur les services portuaires. Elle offre une prime à l'intergouvernemental, en conférant un droit de veto aux Etats et à la résistance des intérêts nationaux.

Au moins aura-t-on appris que le pouvoir d'initiative de la Commission européenne est aussi un pouvoir de retrait, ce qui la place devant ses responsabilités face au projet de directive Bolkestein.

Gilles SAVARY

Député européen
Vice-Président de la Commission Transports et Tourisme
Membre suppléant de la Commission Economique et Monétaire